LAND
OF PLENTY
Article
publié dans la Lettre n° 232
LAND OF PLENTY. Film américain de Wim Wenders
avec John Diehl, Michelle Williams, Richard Edson, Wendell Pierce
(2004-couleurs-2h00).
A bord de son camion équipé d’appareils électroniques, Paul Jeffries
parcourt les rues sombres de Los Angeles, « capitale nationale de
la pauvreté ». Le soir tombe. Surgissent alors des tentes de fortune
qui abritent pour la nuit des dizaines de S.D.F. A l’aide de jumelles,
Paul scrute les visages et les gestes. Nul n’est à l’abri de sa
suspicion, surtout depuis le 11 septembre. L’attaque peut survenir
de n’importe où, de n’importe qui, il en est certain. Investi d’une
mission, il se porte garant de la sécurité des citoyens. Un pakistanais
barbu et enturbanné attire son attention. Il transporte des cartons
qui portent le nom d’un détergent. Cela mérite une filature serrée.
Au même moment, à l’aéroport, débarque Lana, avec la fraîcheur de
ses vingt ans et de son éducation religieuse. Elle rentre au pays
après toute son enfance passée au Moyen-Orient où s’étaient installés
sa mère et son père pasteur. Il lui reste très peu de souvenirs
de Los Angeles mais le premier regard que la ville lui offre, n’est
guère encourageant. Elle est prise en charge, dès son arrivée, par
le directeur de la mission humanitaire d’un quartier pauvre de la
ville. Elle s’y installe et donne un coup de main en attendant de
retrouver son oncle dont sa mère, aujourd’hui disparue, a perdu
la trace. Il n’est autre que Paul qui file toujours le pakistanais
qui, pour lui, a le profil du terroriste. Quelques soirs plus tard,
ce dernier est tué d’une balle devant la mission, par l’occupant
d’un véhicule qui prend la fuite. Mais Paul, posté à le surveiller,
a filmé la scène.
Lana est très jeune. Quel avenir lui offre cette Amérique qui lui
paraît lugubre, exsangue et pauvre? Sa mère, inquiète, n’a eu que
son frère à qui la confier avant de mourir. Paul, vétéran du Vietnam,
est l’un des nombreux rescapés de cette guerre dont l’Amérique ne
finit pas de panser les plaies. Malade et devenu paranoïaque, tel
un Don Quichotte dont la Dulcinée serait son pays, il s’invente
une mission et de hauts faits d’armes. Ils vont se retrouver autour
du corps du musulman assassiné. A Trona, ville spectrale, abandonnée,
où ils viennent ensemble remettre le corps à son frère Ahmed, les
rêves d’exploits de Paul s’arrêtent avec la triste réalité. Mais
c’est là que se rejoignent les chemins de l’oncle et de la nièce.
Il n’est pas facile d’adhérer tout de suite au film de Wim Wenders.
Sa complexité ne vient pas du scénario mais du message qu’il veut
délivrer, celui douloureux d’un état qui fut naguère le miroir du
monde. Land of Plenty a emprunté son titre à une chanson
de Leonard Cohen. Pour le réalisateur, la musique est intrinsèque
à ses films, on se souvient de celle, inoubliable, de Paris Texas.
La place qu’elle tient dans celui-ci est immense, elle souligne
avec justesse chacune des scènes. Les deux comédiens principaux,
portés par la gravité du sujet et le talent du réalisateur, sont
magnifiques. Lien: http://www.ocean-films.com/landofplenty/
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