KEDMA
Article
publié dans la Lettre n° 201
KEDMA. Film
israélien de Amos Gitaï avec Andrei Kashkar, Helena Yaralova, Yussef
Abu Warda, Moni Moshonov, Menachem Lang (2002-couleurs-1h40).
Kedma est le nom d’un cargo, chargé de rescapés juifs à peine
sortis de l’holocauste, et qui se rendent vers la terre qu’on leur
a promise. A bord, chacun se livre avec quelques mots rares, mais
qui révèlent mieux que de longs discours, l’enfer qu’ils ont vécu.
Lorsqu’il arrive, le bateau reste au large et ce sont des barques
qui déversent les réfugiés sur une plage de Palestine. Cependant,
le mandat de la Grande-Bretagne, qui en 1939, a pris la décision
de restreindre l’immigration juive en Palestine, n’a pas encore
expiré. C’est pourquoi un détachement de soldats britanniques, les
accueille au son de ses armes et les pourchasse. Une milice clandestine
juive est aussi sur les lieux, mais ils seront peu nombreux à arriver
vers le camp de fortune qu’on leur a aménagé. Là, après une brève
instruction, ils prendront les armes contre les palestiniens. Le
nom de David Ben Gourion, sur toutes les lèvres, les galvanise,
mais ce sera l’hécatombe. Après la bataille, ramassant morts et
blessés, ils croiseront sur leur route quelques rares palestiniens
égarés, qui n’ont pas encore fui vers Jérusalem, et qui ne comprennent
pas pourquoi on les chasse de cette terre qui était la leur.
Si dans sa première moitié, le film trop laconique de Amos Gitaï
possède quelques longueurs, la deuxième partie, décrit de façon
poignante cette période d’après guerre où les juifs errants crurent
trouver enfin un lieu de paix. Le réalisateur, en deux monologues
hallucinés, ne prend pas partie, il donne simplement la parole à
chacune des deux factions. Mais c’est surtout le cri de désespoir
du paysan palestinien que l’on retiendra: « Ici, nous resterons,
malgré vous, comme un mur. Nous ferons des enfants révoltés, génération
après génération ». C’était en 1948, au moment de la proclamation
de l’indépendance de l’Etat d’Israël. Cinquante-quatre ans plus
tard, la prédiction du paysan est plus que jamais d’actualité, mais
le cri a pris l’ampleur d’une immense clameur qui ne couvre plus
le bruit des armes.
Avec Kedma, Amos Gitaï pose très justement cette terrible
interrogation: Jusqu’où iront-ils pour garder cette terre que chacun
croit sienne? Lien:
www.marsfilms.com/film/minifiche/frame_fiche.php?IDFilm=75
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