FILLES
UNIQUES
Article
publié dans la Lettre n° 216
FILLES UNIQUES. Film français de Pierre
Jolivet avec Sandrine Kiberlain, Sylvie Testud, François Berléand,
Vincent Lindon (2002-couleurs-1h25).
Carole est juge d’instruction. Elle partage une vie chargée entre
Adrien, son mari médecin réanimateur débordé, et les nombreux délinquants
qui défilent chaque jour devant elle, chacun répondant à des méfaits
assez ahurissants. Que faire lorsque l’un d’eux raconte ses actes
en verlan? Quérir dans le couloir une prévenue-interprète qui n’est
autre que Tina. Après avoir traduit l’histoire à l’endroit, elle
lui raconte la sienne, celle de voleuse de chaussures, bien sûr,
mais de luxe! En tant que récidiviste, Carole la condamne à trois
semaines de prison mais le greffier se trompe et relâche la jeune
fille. Croyant en l’indulgence de sa juge, Tina se présente à son
domicile pour la remercier, un carton de gâteaux à la main. Tout
les sépare sauf un point commun: être filles uniques. Le mot palais,
en revanche, prend pour chacune un sens différent car si Carole
s’adonne au « Palais de justice », Tina habite le « Palais de la
femme», un foyer pour jeunes filles sans ressources. La marginalité
va se heurter à l’ordre institutionnel! Carole, stressée par son
travail et les tâches ménagères, ne sait pas encore qui est cette
jeune fille au regard volontaire et au sourire mutin à qui elle
permet de dormir sur le canapé juste une nuit, parce que c’est plus
réconfortant que le dortoir. Une curieuse connivence ainsi qu’une
complicité active vont bientôt les rapprocher car l’une comme l’autre
a trouvé la soeur qui lui manquait.
Pierre Jolivet est un réalisateur éclectique. De Force majeure,
son premier et meilleur film au sujet dramatique, il s’est tourné
vers la comédie tendre avec Ma petite entreprise, puis vers
le film historique Le frère du guerrier qui n’a pas remporté
le succès mérité. Filles uniques s’apparente plutôt au second
car cette comédie de moeurs très féminine et parfois féministe expose
aussi des thèmes plus sérieux comme la frontière entre légalité
et illégalité et les problèmes de conscience. Sa réussite repose
beaucoup sur les épaules des deux comédiennes. Sandrine Kiberlain
en juge BC-BG réussit une excellente prestation en faisant évoluer
son personnage de la bourgeoise plutôt coincée en jeune femme libérée
qui s’encanaille au contact d’une Sylvie Testut craquante en loubarde
de banlieue. Elle campe avec brio une Tina dont la dureté apparente
cache une grande fragilité. Grâce à ce duo irrésistible, Pierre
Jolivet trousse une comédie légère comme une bulle de savon, pleine
de charme et de fantaisie. Lien: www.bacfilms.com/site/filles/
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