FAILAN
Article
publié dans la Lettre n° 208
FAILAN.
Film coréen de Song Hye-sung avec Choi Min-shik, Cecilia Cheung,
Sohn Byung-ho (2001-couleurs-2h00).
En apprenant le décès de Failan, son épouse, Lee Kang-jae n’a aucune
réaction. A peine se souvient-il de cette jeune chinoise, aperçue
dans l’embrasure d’une porte quelques années plus tôt, lors de la
signature du mariage blanc qu’il avait contracté avec elle contre
de l’argent, pour lui permettre de demeurer en Corée. Lee vient
de sortir de prison. Son métier d’homme de main dans le «milieu
» ne ressemble en rien à celui qu’il connaissait. Son patron ne
le cantonne plus que dans des rôles subalternes et les jeunes qui
occupent sa place ne cachent pas leur mépris pour le looser qu’il
est devenu, incapable de se faire respecter, pas même de racketter
une vieille commerçante qui lui tient tête. Il s’apprête même à
endosser le meurtre que son patron vient de commettre et à purger
à sa place la peine de prison qu’il encourt, en échange de la promesse
du bateau de ses rêves... dans quelques années! C’est alors que
l’image flou de la jeune femme prend forme, à travers la photo que
lui tend son ami de galère, lorsqu’il se rend vers le lieu où Failan
a vécu, afin de signer les formalités du décès. Le voyage jusqu’à
l’humble demeure où elle travaillait comme laveuse avant de mourir
de tuberculose, va être pour lui celui de la Rédemption. De l’univers
violent où les insultes forment la majeure partie des phrases qu’on
lui adresse, il découvre celui, simple et paisible, de Failan. Ange
perdu dans un monde de brutes, elle s’est évanouie sans bruit, ne
laissant derrière elle qu’une simple lettre, presque enfantine,
qu'elle ne lui a pas envoyée, dans laquelle elle le remercie, lui
déclare son amour et lui raconte son désir de le rencontrer avant
de mourir. Cet amour idéalisé que Failan lui portait sans l’avoir
jamais vu, va bouleverser le cours de sa vie et lui permettre de
se considérer sous un nouveau jour.
Le film de Song Hye-sung est un vaste champ d’exploration des sentiments
fait de retours en arrière et de marches en avant où la vie de l’un,
transcendée par le rêve d’une rencontre impossible, va atteindre
l’autre, une fois la mort accomplie. A l’instar des films japonais,
nous retrouvons dans celui-ci le cocktail identique de cruauté et
de douceur, fait de violences verbales et gestuelles et de mots
doux et romantiques, l’oscillation entre l’extrême brutalité du
milieu de la pègre et la douceur du monde de Failan. Cecilia Cheung
est parfaite dans ce rôle parce qu’elle écarte toute mièvrerie dans
son interprétation. Quant à Choi Min-sik, révélé par sa prestation
dans le film Ivre de femmes et de peinture, il est magistral
dans celui de Lee, malfrat transfiguré par l’amour qu’une simple
jeune fille lui a porté. Trois salles dont Elysées Lincoln 8e
(01.43.59.36.14). Lien: www.failan.co.kr/
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