2046

Article publié dans la Lettre n° 233


2046. Film franco-chinois de Wong Kar Wai avec Tony Leung, Gong Li, Zhang Ziyi, Takuya Kimura (2003-couleurs-2h05).
Il y a quatre ans, lors de la projection de In the mood for love, nous avions laissé Monsieur Chow (Tony Leung, toujours séduisant), au début des années soixante, enfouir son secret dans le trou d’une pierre. Il avait aimé une femme d’un amour impossible, il le confiait à la pierre d’un vieux temple. Le théâtre de leurs retrouvailles platoniques était la chambre 2046 d’un hôtel de Hong Kong. Nous retrouvons aujourd’hui Monsieur Wong, à la recherche de cet amour perdu. Dans le train du souvenir «Il part pour 2046 dans l’espoir qu’elle s’y trouverait». Ces dernières années, il les a vécues dans la débauche, broyant sa vie dans les mâchoires avides d’un tripot de Singapour et étanchant sa soif de sexe dans les bras des filles de joie. Aujourd’hui revenu à l’hôtel de ses amours anciennes, il occupe la chambre 2047 où il écrit des romans un peu lestes, inspirés de ses liaisons. Il met la dernière main à son ultime roman qu’il a intitulé 2046, dans lequel ses personnages, embarqués dans des trains futuristes, se dirigent vers une ville étrange où le temps est suspendu et les souvenirs immuables. Incapable de retrouver l’amour, il se laisse aimer par la ravissante Bai Ling, courtisane de la chambre 2046, sans se douter que cet amour va laisser chez elle les mêmes regrets que les siens. Il se lie d’amitié avec Wang, la fille aînée du patron de l’hôtel, amoureuse et aimée d’un japonais contre l’avis paternel, et dont il fera son assistante. Il se souvient du tripot où il croisa Su li Zhen, l’énigmatique jeune femme qui porte le même nom que l’aimée, personnage du film antérieur, de nouveau incarné par Maggie Cheung. Qu’a-t-elle de commun avec sa Su li Zhen dont elle porte le nom? «On passe à côté de l’âme soeur trop tôt ou trop tard». A-t-il refait la même erreur? Sont-ils ces amoureux d’autrefois et cela a-t-il encore de l’importance?
Que 2046 soit ou non la continuité de In the mood for love, là n’est pas l’important car le spectateur entre dans les films de Wong Kar Wai comme dans un rêve éveillé, ébloui par la beauté esthétique qui éclabousse l’écran, par la maîtrise absolue des prises de vue faites en grande partie d’une suite de gros plans sur des personnages saisissants d’élégance et catalyseurs d’émotions palpables. Toute la philosophie de l’orient, telle qu’on la soupçonne, est là, livrée simplement, sans bruit ni fureur. Portée par un choix musical dont la charge émotionnelle est identique à celle de l’oeuvre précédente, celle-ci se résume à l’éternel regret d’un premier amour insatisfait et à cette triste interrogation de Bai au milieu de ses larmes: «Pourquoi ne peut-on pas revenir en arrière»? Lien: http://www.ocean-films.com/2046/


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