LA VERITE TOUTE NUE

Article publié dans la Lettre n° 269


LA VÉRITÉ TOUTE NUE de David Lodge. Texte français Armand Eloi. Mise en scène Christophe Correia avec Claire Nebout, Patrick Raynal, Jacques Frantz, Isabelle Renauld.
Une jolie pièce à vivre dans un cottage lové dans le Sussex, en pleine nature, loin des rumeurs de la ville mais trop souvent survolé par les avions de l’aéroport tout proche, nothing is perfect ! Eleanor et Adrian Ludlow se sont installés là lorsqu’Adrien a pris la décision de cesser d’écrire. Il consacre désormais son temps à l’élaboration d’une anthologie. Après la publication de la Planque, un livre culte pour toute une génération et encore étudié au lycée à sa grande fierté, ses romans ne lui ont pas apporté la notoriété qu’il souhaitait. Il a estimé qu’il n’avait plus rien à dire. Ils ont arrangé au mieux cette maison de campagne. Eleanor y a installé un petit atelier de céramique. Mais pour elle, cette retraite loin du monde est difficile à vivre. De ce ménage baba cool des années soixante sont nés deux enfants happés par la vie citadine. Ce dimanche matin, Eleanor et Adrian viennent de lire un article publié dans le Chronicle par Fanny Tarrant, une journaliste à la dent dure qui vient d’interviewer leur plus vieil ami Sam. Malgré l’amitié qui les a unis autrefois, le couple ne peut s’empêcher de ressentir une certaine satisfaction mêlée d’amusement en voyant Sam, une grande gueule, feuilletoniste imbu de sa personne, épinglé de cette façon, même si l’article est publié dans un torchon à scandales dont les people sont friands. Sam qu’il n’ont pas revu depuis longtemps, survient fou furieux. Il veut se venger de la journaliste indélicate mais a besoin de la complicité d’Adrian. Il lui arrache la promesse d’accepter l’interview sollicitée par Fanny afin de la piéger et lui promet en retour l’adaptation pour la télévision de l’un de ses romans. Fanny Tarrant qui avait essuyé le refus de l’écrivain s’étonne de son revirement mais la perspective d’un article croustillant balaie ses doutes. Elle arrive, s’installe, allume son appareil enregistreur et prend son stylo. Elle ignore que l’écrivain enregistre lui aussi leur conversation. L’échange ne se déroule pas tout à fait comme le prévoyait la journaliste, elle va même de surprise en surprise. Lorsque les confidences tombent, elle arrête l’enregistrement. Celui d’Adrian en revanche, poursuit son chemin, insidieux.
David Lodge construit soigneusement sa pièce autour des trois personnages au passé commun qui, entre amitié et trahison, évoluent dans le monde sans pitié de l’écriture et de l’audiovisuel, milieu aussi trouble que celui du journalisme exécrable représenté par Fanny. Entre humour et dérision, ses dialogues très écrits font mouche et il gratifie son auditoire de quelques très belles réflexions sur la création littéraire et le constat sur les réalisateurs qui sacrifient leur talent sur l’autel de l’argent et de la médiocrité. Il brosse aussi un portrait très dur des journalistes qui tueraient père et mère pour un papier et dont les articles brisent souvent ménages et amitiés, voire des vies. Les quatre comédiens, excellents, mettent parfaitement en relief ce texte remarquable, grâce à une mise en scène d’une formidable efficacité jusqu’au dernier rebondissement. Nous sommes le dimanche 31 août 1997. Eleanor et Adrian attendent dans l’angoisse l’article de Fanny Tarrant sur Adrian qui doit paraître ce matin dans le ChronicleThéâtre Marigny-Salle Popesco 8e. Lien : www.theatremarigny.fr.


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