UNE FEMME DE LETTRES
UN BI-CHOCO SOUS LE SOFA

Article publié dans la Lettre n° 187


UNE FEMME DE LETTRES et UN BI-CHOCO SOUS LE SOFA de Alan Bennett. Texte français Jean-Marie ABesset. Mise en scène Jean-Claude Idée avec Tsilla Chelton.
Alan Bennett a une prédilection pour la classe moyenne britannique qu’il croque toujours avec un humour exempt de méchanceté. Il n’a pas son pareil pour décrire le petit pavillon et sa bouteille de lait devant la porte, coincé entre deux autres dans une rue de la banlieue londonienne, le policier et ses rondes, et les fenêtres depuis lesquelles la ménagère désoeuvrée et bien pensante épie le quartier et les voisins.
Irène, femme de lettres et Diane, adepte de la propreté, en sont deux prototypes. La première, célibataire, a toujours vécu dans l’ombre d’une mère qu’elle vient de perdre. Aujourd’hui seule, elle n’a pas d’amies, très peu de relations. L’ennui la conduit donc à surveiller ce qui se passe autour d’elle et à signaler d’une plume vengeresse tout ce qui porte à critique ou à suspicion. Des voisins qui se conduisent bizarrement, une cérémonie de crémation pour le moins expédiée, de bonnes raisons pour prendre la plume et prendre à témoin qui de droit, jusqu’au jour où ses écrits finiront par troubler l’ordre public. La vie de Diane est presque identique. Veuve sans enfants, elle est aussi seule qu’Irène, aussi isolée au milieu d’une société indifférente. Elle est parvenue à un âge où elle ne peut se passer d’une aide ménagère qui chaque semaine lui conseille d’aller finir ses jours dans l’un de ces mouroirs où la solitude est encore plus palpable. « Cela jamais », dit-elle, même s’il lui arrive de retrouver un bi-choco sous son sofa, laissé là depuis des mois par un balai peu courageux.
Tsilla Chelton, dans une mise en scène très simple mais qui la met diablement en valeur, elle et son texte, campe ces deux portraits de femme, l’un après l’autre. Avec un dynamisme qui laisse pantois, c’est une leçon de culture physique et de joie de vivre qu’elle offre, assise, debout, grimpant à l ’échelle d’un lit ou allongée, soliloquant avec humour dans une diction parfaite. Un vrai moment de bonheur qui permet de retrouver le charme d’un grand écrivain et celui d’une formidable interprète. Théâtre Tristan Bernard 8e (01.45.22.08.40).


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