PLAY HOUSE

Article publié dans la Lettre n° 382
du 4 mai 2015


PLAY HOUSE. Texte de Martin Crimp. Mise en scène Rémy Barché avec Myrtille Bordier, Tom Politano, et la voix de Paulette Wright.
Comment dire l’ambiguïté du couple, au-delà de ses apparences ? Ils sont beaux, jeunes, pleins de fougue, d’émerveillement et d’amour mutuels. Semble-t-il… Mais il y a l’ordinaire quotidien, les désirs disparates que vient alimenter l’autre, cette voisine invisible sur laquelle on fantasmerait peut-être. De déclarations d’amour presque ridicules à force de naïveté convenue en affrontements violents, sous-tendus par les ombres d’un trouble passé, par une folie entrevue, le vernis du confort se craquelle. Les meubles ne résistent pas aux coups de pied rageurs, les yaourts moisissent dans l’impeccable réfrigérateur, les végétaux rejoignent la poubelle. Et surtout, l’incommunicabilité menace, dans les dialogues à sens unique, le refus des réponses, les pleurs solitaires. Tout est factice, les perruques s’envolent, le chaos bien réel s’installe, avec lui la crasse qu’on n’évacue plus. Treize moments de banalité apparente, mais d’absurdité foncière, qui renvoient à une inexorable solitude, même si elle est partagée dans les gestes, les danses et les éclats de rire du jeune couple. Au milieu des objets du quotidien, le jeu est rapide et plein d’humour, sans effet d’insistance, scandé par une voix off, atone, qui égrène les treize chiffres, comme le glas de l’innocence et de la joie. Et, au-delà du rire, on est interpellé et dérangé par cette efficacité, tant elle renvoie chacun à ses propres réminiscences. A.D. Théâtre de Belleville 11e.

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