LA MONNAIE DE LA PIECE

Article publié dans la Lettre n° 309


LA MONNAIE DE LA PIÈCE de Didier Caron et Roland Marchisio. Mise en scène Didier Caron avec Caroline Anglade, Jean-Paul Bazziconi, Didier Caron, Andrée Damant, Yvan Garouel, Daniel Lobé Laurence Pierre, Serge Ridoux.
Dans le salon petit bourgeois aux meubles de style d’une maison certainement très plaisante, Bob est fébrile. Face à un Pinocchio en bois, il répète le petit discours ou plutôt la supplique qu’il va tenir à Miss Grumble, la représentante de la SGEG, société de gestion d’emprunts garantis, auprès de qui il souhaite ardemment solliciter un crédit. Joujoubois, sa société, est en faillite et il doit absolument trouver deux millions de livres s’il ne veut pas voir sa villa saisie. Betty, sa femme, petite chose fragile, à la tension si basse qu’elle peut faire une énorme dépression, ne s’en remettrait pas. Il souhaiterait d’ailleurs que Miss Grumble arrive avant elle afin de régler son problème. Le prince du jouet en bois affine son mea culpa lorsque la sonnette retentit. Maître Barner de chez Barner & etc… fait son entrée. Il a la tête de l’emploi et délivre très très vite le motif de sa visite : une saisie accélérée à programmation précaire, suite à un commandement de payer resté lettre morte.
De plus en plus fébrile, Bob regarde, impuissant, l’huissier commencer l’inventaire de ses biens, lorsque Betty rentre très déprimée de chez le médecin. Il lui dit un premier mensonge sur l’identité et surtout la profession de l’individu un peu trop bruyant qu’il a réussi à escamoter dans la pièce à côté. Mais comme chacun sait, les hommes mentent très mal et un pied dans le mensonge, c’est le doigt dans un engrenage inéluctable. Il aimerait beaucoup que Maître Barner active son inventaire mais celui-ci lui répond d’un ton doucereux : « le temps c’est de l’argent et, comme je prends votre argent, je prends mon temps ». Que répondre à cette évidence ? Il n’a d’autre ressource que de le présenter à sa femme, allez savoir pourquoi, comme un prêtre-radiesthésiste venu exorciser les lieux. Au cours de cette matinée qui promet d’être cauchemardesque, Bob voit arriver chez lui une flopée de gens : Harold, son meilleur ami, sur lequel il va tenter de se reposer, un livreur à la peau un peu mate qui vient apporter du matériel de remise en forme contre un chèque exorbitant et qu’il présente à l’huissier comme son fils, sa belle-mère qui, sentant le vent, souhaite retirer sans délai ses billes de la société, un agent immobilier qui lui a trouvé l’acheteur idéal pour sa villa puis, enfin, sa planche qu’il croit de salut, en l’occurrence Miss Grumble, qu’il fait passer aux yeux de sa femme pour son esthéticienne. D’un mensonge à l’autre, sa situation devient désespérée et l’on ne vous en dira pas plus, excepté car c’est important, que Betty, cette petite chose si fragile, adore le théâtre et qu’elle répète en ce moment une pièce sur un type qui habite Bergerac
Didier Caron et Roland Marchisio nous ont concocté une de ces comédies dont ils ont le secret, basée sur le mensonge, comme bien souvent dans ce genre. L’idée sur laquelle repose l’intrigue est excellente car elle permet une suite irrésistible de rebondissements jusqu’à la toute dernière scène. Grâce à une mise en scène survoltée et des dialogues aussi incongrus qu’hilarants, toute la petite bande semble autant s’amuser que les spectateurs, avides de reposer leur cerveau après une journée épuisante. Si Bob reçoit la monnaie de sa pièce, eux en ont pour leur argent ! Théâtre Michel 8e.


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