MISTERIOSO-119

Article publié dans la Lettre n° 369
du 26 mai 2014


MISTERIOSO-119 de Koffi Kwahulé. Mise en scène Laurence Renn Penel avec Jana Bittnerova, Maïmouna Koulibaly, Gabrielle Jéru, Douce Mirabaud, Natacha Mircovich, Karelle Prugnaud.
Une femme annonce sa propre mort, désigne la fauteuse, présente les témoins. Elles sont cinq, anonymes mais si présentes dans leur corps, leur violence, l’obsession d’une sensualité exacerbée par la détention. La vie ne leur a rien épargné, drogue, inceste, meurtre, infanticide. Elles rodent comme des fauves, épient la proie, déchirent le corps. Aucun remords. Toute conscience morale les a désertées, seul le regard peut les déranger. Dans la touffeur de leur claustration, elles jettent leur impudeur verbale et physique au voyeurisme ambigu des religieuses garde-chiourme, et déchaînent la frustration des corps dans la souplesse véhémente de leur prestation de pompom girls.
Dans cet opéra barbare, où le tragique se scande en flux et reflux avec la trivialité et la sanie, on est entraîné vers l’acmé de la cruauté et du sacrifice, aux accents lancinants et stridulents du violoncelle du matricule 119. Tempo crescendo et misterioso.
Des praticables enserrent de leurs bras de métal le petit espace scénique où l’innocente tente l’exercice de la normalité, au prix de son sacrifice. En surplomb, dans le lieu du meurtre rituel, l’eau lustre du sang répandu, mais n’amendera jamais le crime, celui-ci précisément, ceux qui l’ont précédé, celui qui immanquablement est à venir.
Monde du dedans sans limite, dont on s’extirpe tout ébranlé vers un dehors aux couleurs définitivement troublées. A.D. Cartoucherie - Théâtre de la Tempête 12e.


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