LAMPEDUSA BEACH

Article publié dans la Lettre n° 353
du 15 avril 2013


LAMPEDUSA BEACH de Lina Prosa. Traduction Jean-Paul Manganaro. Mise en scène et scénographie Christian Benedetti avec en alternance Céline Samie ou Jennifer Decker.
« Je suis Céline ». Cette identification et sa couleur de peau permettent à la comédienne de rester extérieure au personnage. Cette distanciation est sans doute nécessaire. Elle peut ainsi relater l’odyssée de Shauba, une jeune africaine embarquée sur l’un de ces bateaux d’émigrés, en partance pour la tristement célèbre île de Lampedusa. Le même périple que celui de ses sœurs ou ses cousines, constate-t-elle : « Nous sommes comme un collier de perles cassé ». L’une après l’autre, elles quittent le pays sur une embarcation de fortune. L’impossibilité de rester chez elle où vivent déjà vingt-quatre personnes oblige Shauba à émigrer dans des conditions infra humaines, à la merci d’un passeur, entassée sur l’une de ces « charrettes de la mer » avec… 699 malheureux, subissant alors un autre calvaire. Et puis, survient l’ahurissant naufrage, à une encablure des côtes d’une île que Shauba ne foulera jamais du pied. « Le naufrage a été total et d’une simplicité absolue… La mer est innocente ». Alors au fond de la mer, Shauba interroge : « Et Mahomet, qu’est-ce qu’il prévoit dans ce cas-là » ?
Céline Samie retrace avec simplicité le destin tout aussi simple, dans son issue tragique, d’une jeune fille à la vie fauchée. Et cette simplicité apostrophe le spectateur incrédule, pourtant au fait de semblables traversées, mais effaré à l’écoute de tant de monstruosité et de bêtise. Bref mais superbement dense. Comédie-Française-Studio-Théâtre 1er.


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