FEFFREY BERNARD EST SOUFFRANT

Article publié dans la Lettre n° 179


JEFFREY BERNARD EST SOUFFRANT de Keith Waterhouse. Adaptation Jacques Villeret et Dominique Deschamps. Mise en scène Jean-Michel Ribes avec Jacques Villeret, Yves Pignot, Marie Vincent, Guillaume de Tonquédec, Virginie Aster.
« Jeffrey Bernard est souffrant ». C’est par cet euphémisme que le journal « The spectator » excusait l’absence d’article de leur inconséquent chroniqueur. A cette formule laconique, le directeur y recourut tant de fois qu’il finit par renvoyer le souffrant. Enfermé par mégarde dans un bar par un patron sans doute pressé de boucler la lourde, Jeffrey Bernard est donc coincé là, avec un téléphone qui ne réveille personne et une bouteille de vodka. Jeffrey totalise à lui seul trois très gros défauts: il boit, fume et joue aux courses. Le plus curieux est que pas moins de quatre femmes se sont suffisamment penchées sur son cas pour faire un bout de route avec lui, espérant sans doute le changer. Changer J.B., quelle idée saugrenue! Il s’agit là d’une mission impossible chez un homme à peu près normal après vingt ans d’éducation maternelle plus ou moins aberrante et quelques années de célibat, alors J.B!
Gentiment misogyne, un grain cynique, drôle ou philosophe, notre prisonnier tue le temps, attendant l’ouverture en convoquant ses souvenirs. Sa propre vie, c’est encore ce qu’il connaît le mieux bien qu’il reconnaisse avoir des trous complets sur certaines années. Ses rencontres dans les bars ou sur les champs de course, les copains et leurs folies, ses femmes, bref, tout ce qui a fait la vie d’un homme de cinquante ans qui, après avoir brûlé la chandelle par les deux bouts, se trouve au bout du rouleau. Cette comédie débridée et turbulente, imaginée à partir d’une existence réelle et fort bien adaptée, est un véritable défit pour les comédiens et pour le metteur en scène. Jean-Michel Ribes, grâce à l’ingéniosité et l’originalité dont il fait preuve une fois de plus, offre une mise en scène originale et dynamique à l’acteur principal et à ses quatre compères qui font intrusion aux meilleurs moments dans la peau d’une cinquantaine de personnages, illustrant de façon savoureuse le strip-tease mental de notre héros. Jacques Villeret fait merveille dans un rôle à sa mesure, tour à tour drôle, émouvant et tellement naturel! Chapeau bas pour leur performance. Théâtre Fontaine 9e (01.48.74.74.40).


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