JE T’AI LAISSÉ UN MOT SUR LE FRIGO

Article publié exclusivement sur Internet avec la Lettre395
du 11 avril 2016


JE T’AI LAISSÉ UN MOT SUR LE FRIGO d’Alice Kuipers. Adaptation et mise en scène Marie Pascale Osterrieth avec Michèle Bernier et Charlotte Gaccio.
Un frigo constellé de post - it et de petits mots plaqués par des aimants, quoi de plus normal aujourd’hui lorsque les mamans divorcées travaillent et que leurs enfants, désormais ados, se débrouillent seuls et doivent même prendre part aux travaux domestiques ? Chez Kate et sa maman médecin, la porte du frigo est littéralement constellée de ces papillons multicolores. Les listes de courses à l’épicerie côtoient les avis de repas préparés et laissés dans le frigo à l’attention de l’autre, les rappels plus ou moins pressants, celui du lapin Bugs Bunny dont il faut prendre soin, celui de l’argent de poche déposé ou non sur le micro - ondes, celui du lave - vaisselle qui refuse de se décharger tout seul. La bonne marche de la maison est le seul point commun entre deux vies parallèles, celle d’une mère trop prise par un travail qui la passionne et celle de sa fille de quinze ans dont le lycée, les copains, le shopping et la première peine de cœur sont les petits événements journaliers qu’elle souhaiterait partager davantage avec elle. Bisous et disputes émaillent le contenu des petits mots. La mère a bien découvert une petite boule dans son sein droit mais rien de bien grave à l’heure où la médecine guérit tout ou presque. L’hiver vient de se terminer, le printemps pointe ses crocus dans le jardin illuminé d’un soleil qui fait fondre la dernière neige. Kate fait déjà des projets de vacances, lorgnant du coin de l’œil le bikini de ses rêves tandis que les mots de sa mère se veulent rassurants, puis de moins en moins au fil des semaines. L’été arrive et avec lui l’anniversaire des seize ans de Kate. L’insouciance cède la place à l’anxiété, puis à la prise de conscience. Le temps vole vers l’automne puis l’hiver est déjà là, aussi froid que la maison. Il n’y a plus de post - it sur la porte du frigo, aussi immaculée que la neige sur la terre du jardin, aussi glacée que le cœur de Kate, seule désormais avec ses questions et ses regrets.
Michèle Bernier et Charlotte Gaccio, mère et fille, s’approprient ce texte émouvant, si bien traduit, et se renvoient la balle, complices. L’émotion plane sur la scène comme dans la salle, bientôt désertée par un public un peu sonné. Il ne sort pas indemne de cette lecture. Théâtre de Paris - Salle Réjane 9e (01.42.80.01.81).

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