JE PRÉFÈRE QU’ON RESTE AMIS

Article publié dans la Lettre n° 366
du 24 mars 2014


JE PRÉFÈRE QU’ON RESTE AMIS de Laurent Ruquier. Mise en scène Marie Pascale Osterrieth avec Michèle Bernier, Frédéric Diefenthal.
Ils s’étaient rencontrés cinq ans auparavant chez un ami commun. Pas une semaine ne s’était écoulée depuis, sans qu’ils se parlent au téléphone ou passent une soirée ensemble. Ils faisaient partie de ces rares amis des deux sexes pour qui, justement, l’amitié dépasse le désir d’en venir au sexe. Pour Valentin, cela ne faisait aucun doute. Claudine ne remplacerait jamais le meilleur des amis. Avec elle, il s’amusait, discutait, se racontait sans arrière-pensée. Pour elle, en revanche, cette rencontre et l’amitié qui s’en suivit avaient été différentes. Sans vouloir se l’avouer au début, elle était immédiatement tombée amoureuse de ce type, puis elle s’était appliquée à s’en cacher. Aujourd’hui elle n’en peut plus. Il faut qu’elle lui avoue ses sentiments, elle veut enfin entendre de sa bouche les mots doux qu’il réserve aux autres et partager son lit. La soirée qu’elle a préparée devait être la plus belle de sa vie mais lorsqu’il lui lâche la fameuse phrase : « Je préfère qu’on reste amis », sa déconvenue laisse la place à la stupeur. Derrière le Valentin qu’elle croyait connaître par cœur, s’en cache un autre dont elle ne supposait pas un seul instant l’existence. Et comble de trahison, son amie Marie-Annick, elle, était au courant !
Qu’attend-t-on d’une comédie romantique ? Qu’elle fasse rire sans tomber dans les bons sentiments à l’eau de rose. La surprise, elle, est rarement au rendez-vous.
À première vue, Laurent Ruquier et comédie romantique font une curieuse association même si l’on connaît depuis longtemps l’indiscutable talent de l’auteur. La surprise est pourtant là, à tout moment, dans les décors qui évitent l’écueil de la banale salle de séjour, dans la raison alléguée par le titre, autre que celle qui coulerait de source, dans l’écriture où aucun bon mot ne tombe à plat mais vient, bien au contraire, se loger à point nommé à chaque réplique, provoquant une hilarité ininterrompue.
Marie Pascale Osterrieth a parfaitement compris ce qu’elle pouvait tirer d’un pareil joyau. Les intermèdes chantés sont ingrats à placer. Elle trouve la solution idéale en laissant Michèle Bernier fredonner a cappella les premières mesures, puis ajoute discrètement l’accompagnement. L’interprétation enfin. Être comédienne et lire un jour le texte d’une pièce écrite pour soi! Une rareté ! Michèle Bernier a reçu ce formidable cadeau et son bonheur est flagrant. Brillamment accompagnée par Frédéric Diefenthal, toujours aussi séduisant, elle est cette fleur bleue qui croit encore dur comme fer à l’amour et au bonheur. Sa façon d’être, simple, directe et follement naturelle est celle qu’on imagine être la sienne dans la vie. Une comédie romantique réussie au-delà de toute espérance. Théâtre Antoine 10e.


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