L'EPREUVE et LES SINCERES

Article publié dans la Lettre n° 217


L’EPREUVE et LES SINCERES de Marivaux. Mise en scène Béatrice Agenin avec Béatrice Agenin, Arnaud Bédouet, Céline Clément, Juliette Duval, Raphaëline Goupilleau, Maxime Leroux, Geoffrey Thiebaut.
«Toute vérité n’est pas bonne à dire ». Ce dicton restera gravé en lettres d’or dans l’esprit de la Marquise. Elle prône en tout lieu la franchise. La vérité s’accompagne chez elle d’un caractère ombrageux. Elle aime dire son fait aux autres mais déteste entendre ses quatre vérités. Marthon, sa camériste, voit d’un mauvais oeil l’hymen que la Marquise veut nouer avec Ergaste. Non pas que l’homme lui déplaise mais Frontin, le valet de celui-ci, l’insupporte. Elle aime le valet de l’autre prétendant de Madame. Frontin se trouve face aux mêmes problèmes. Les valets pactisent pour défaire ce lien qui se noue. D’une vérité détournée à l’autre, l’Epreuve démontre quel jeu cruel l’homme est capable de jouer à sa bien-aimée afin d’être sûr d’être aimé pour sa personne et non sa fortune. Marivaux est l’auteur le plus difficile à jouer selon les comédiens.
Marivaux porte au sommet la langue française dans toutes ses subtilités. Le nuancier paraît pastel pour mieux piquer au vif la noirceur des travers de l’âme humaine. Béatrice Agenin associe judicieusement ces deux pièces. Elle signe une mise en scène sobre et classique. Elle interprète une Marquise perfide à souhait dans une sincérité exacerbée. Elle déploie dans la scène des portraits une drôlerie acidulée, malheur à ses amis! Qu’elle soit Marthon ou Lisette, Raphaëline Goupilleau joue les soubrettes finaudes, modulant à merveille sa petite voix de souris qui rugit. On regrettera néanmoins le choix d’Arnaud Bédouet qui incarne pâlement l’amoureux éconduit de la Marquise ou Lucidor. Il semble ne pas croire en ses personnages, nous non plus! Heureusement, Maxime Leroux incarne deux rôles aux antipodes avec un égal talent. Qu’il soit Ergaste, le misanthrope maladroit des Sincères ou Basile, le paysan rêvant au mariage, il nous régale d’une interprétation haute en couleur. Il faut dire que Basile roulant les « r » et patoisant les verbes, a une conception de l’amour qui fait rire toute la salle. Théâtre 14 Jean-Marie Serreau 14e (01.45.45.49.77) jusqu’au 1er novembre 2003.


Retour à l'index des pièces de théâtre

Nota: pour revenir à « Spectacles Sélection » il suffit de fermer cette fenêtre ou de la mettre en réduction