L'EDUCATION DE RITA

Article publié dans la Lettre n° 192


L’EDUCATION DE RITA de Willy Russell. Adaptation et mise en scène Michel Fagadau avec Bernard Fresson, Mathilde Seigner.
Franck enseigne la littérature à l’université. Obligé d’accepter des cours du soir, le professeur décide de forcer sur le ton bourru et désagréable afin de décourager cette élève importune. C’était sans compter sur l’obstination de Rita à prendre des cours. Alors que pour la plupart des étudiants, les études ne sont qu’un pensum obligatoire et acquis, Rita veut accéder à la culture, au savoir. Son milieu social, sa vie, ne lui ont pas permis de suivre des études. Bien sûr, l’éducation de Rita ne va pas sans heurts et ses appréciations sur les grands de la littérature peuvent être lapidaires. Le professeur et l’élève ont autant à apprendre l’un de l’autre. Rita est une tornade. Cette jeune femme décidée prend son destin à bras le corps et celui de son professeur, revenu de tout, qui noie son cynisme dans l’alcool. L’élève et le professeur prennent les cours de l’école de la vie. Elle insuffle la curiosité, l’étonnement, un autre langage à cet homme confit dans son savoir. Même si le pauvre Proust n’a pas l’heur de plaire à Rita, elle ne se laisse pas avoir par le « bien-pensant culturellement correct ».
Michel Fagadau a créé cette pièce de Willy Russell avec Henri Garcin et Anémone. Le langage de Rita étonnait alors par des formules qui n’étaient pas encore entrées dans le langage courant. La personnalité entière de Mathilde Seigner, son tempérament, sa gouaille colorent le texte. Elle est un ouragan sur le campus. Avec elle sur le plateau, il se passe quelque chose, elle a une vraie présence et une nature qui balance du tragique au comique. Bernard Fresson ressemble à s’y méprendre à un professeur que l’on a croisé. Attentif, bourru, il cache beaucoup de remords et de tendresse. C’est un plaisir de revoir ce grand comédien puissant au coeur tendre. Il retrouve son complice Fagadau avec qui il a joué Butley et Le Knack. Sa mise en scène est une réussite puisqu’on « l’oublie » (ce qui est une injustice). On rit beaucoup à cette université de la vie et de la tolérance. Comédie des Champs-Elysées 8e (01.53.23.99.19).


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