LA DÉGUSTATION de Ivan Calbérac. Mise en scène de l’auteur. Avec Isabelle Carré, Bernard  Campan, Mounir Amamra, Éric Vieillard, Olivier Claverie.
                  Prenez  une sage-femme célibataire qui approche de la quarantaine, bénévole au Secours Catholique  et un caviste quadra « fermé à double tour », patron d’une boutique  de vins dont la montre affiche curieusement le fuseau horaire de la  Nouvelle-Zélande. Ajoutez un jeune en liberté conditionnelle, à la recherche  d’un stage de réinsertion, un médecin préoccupé par le résultat des analyses de  son patient - caviste, et un voisin libraire qui survient dix secondes - chrono  après avoir entendu le bruit caractéristique d’un bouchon qui saute, et vous  entrez dans le cercle très fermé d’un magasin où la biodynamie et les vins prestigieux  sont rois. (Bravo pour le décor). 
                  Hortense  de la Villardière assume très bien sa particule et son milieu. Elle est au  mieux avec le curé de sa paroisse et les pauvres du quartier. Elle pousse pour  la première fois la porte de la boutique de Jacques à la recherche d’une bonne  bouteille pour les SDF avec qui elle partage son dîner une fois par semaine. De  fil en aiguille, elle s’inscrit à un atelier - dégustation auquel s’invite  Guillaume, le libraire. Après avoir forcé la main du caviste, Steve, engagé  comme commis pour le fameux stage, participe à cette soirée très sérieuse  durant laquelle Jacques explique les différentes étapes de la découverte du  noble breuvage. Hortense se révèle une élève consciencieuse sauf lorsqu’il  s’agit de recracher, quelle idée, et Jacques a tôt fait de déceler chez Steve d’étonnantes  prédispositions pour l’œnologie. Guillaume, quant à lui, rêve de voir Jacques  s’intéresser de plus près à Hortense. Mais Jacques porte en lui un lourd secret.
                  Ivan  Calbérac crée de toutes pièces ce petit chef-d’œuvre d’humour et d’émotion avec  un irrésistible sens de la réplique. Ses personnages, brossés avec beaucoup de  finesse, vivent des situations qui dévoilent peu à peu la réalité des rêves  inassouvis et des drames passés. L’excellente mise en scène, rythmée par un  florilège de musiques de jazz, emporte les comédiens dans des rebondissements  qui provoquent chez le spectateur des sentiments contrastés, un rire éperdu  dans la première partie, une émotion pure dans la deuxième.
                  Jacques  remettra-t-il sa montre à l’heure française ? Hortense partira -t- elle  pour l’Espagne ? Ivan Calbérac vous offre la meilleure des réponses, il pratique  à merveille l’art de la chute. M-P.P. Théâtre de la Renaissance 10e.