DE PÉKIN À LAMPEDUSA

Article publié dans la Lettre n° 437
du 13 septembre 2017


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DE PÉKIN À LAMPEDUSA. Texte et mise en scène Gilbert Ponté avec Malyka R. Johany.
Il était une fois une gazelle, qui courait plus vite que le vent, dans les ornières de l’asphalte de Mogadiscio. Elle ne savait pas, ne voulait pas savoir qu’au pays des shebabs de Somalie, la femme n’est rien. Rien du tout, simplement un corps enfoui dans des voiles opaques. Mais la gazelle têtue courait la nuit sur le stade désert, le jour dans les rues de tous les dangers, les yeux levés vers les étoiles de la victoire. La passion l’emporte toujours sur la résignation. Se mesurer aux déesses du Panthéon, tu n’y penses tout de même pas, ma fille ? Eh si, sélections, délégation officielle, finale, oui. Même si les baskets sont trop grandes, même si personne ne la remarque vraiment derrière les stars de la piste. Elle est à Pékin, elle vole sur le petit nuage de ses illusions de championne. Plus rude sera la chute dans l’enfer des assassins patentés, dans l’anonymat terrifiant des femmes. Mais comment s’en contenter quand on a la tête pleine de rêves, quand on a une revanche à prendre sur le meurtre de ce père avec qui on n’a jamais cessé de converser ? Premier départ, première fuite, puis l’exil monstrueux vers l’Europe des victoires entrevues. Elle vivra l’horreur des migrations clandestines, la barbarie des mâles, l’épuisement des corps et des âmes, la vie têtue qui résiste à presque tout, sauf à la noyade. Et elle ne franchira pas la ligne d’arrivée.
L’espace scénique est dépouillé d’artifices, animé seulement par les films du stade de Pékin ou des rues de Mogadiscio. Malyka Johany l’emplit de ses chants et de sa voix chaude, de ses sourires d’innocence et d’espoir, de ce corps souple et véloce que la haine des hommes contraint à se voiler. Certes, mais dans la flamboyance des voiles, rouge du sang qui frémit, orange de la flamme. Peut-être pas olympique, mais olympienne à coup sûr. Parce que le firmament survit à toute extermination.
Salut l’athlète ! A.D. Théâtre Essaïon 4e.


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