LES CARNETS D’ALBERT CAMUS

Article publié dans la Lettre n° 475
du 20 mars 2019


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LES CARNETS D’ALBERT CAMUS. Adaptation, mise en scène et interprétation Stéphane Olivié Bisson. Collaboration artistique Bruno Putzulu.
« Je me force à écrire ce journal mais ma répugnance est vive », écrit Albert Camus dans un de ses carnets. Que penserait-il s’il voyait leur contenu ainsi divulgué sur scène, lui pour qui « la vie est secrète » ? 
Ces confidences n’ont rien de subversif. Elles marquent son attachement à l’Algérie, au quartier Belcourt, au cimetière face à la mer et à l’odeur des caroubiers, souvenirs émus d’une enfance vécue à Alger auprès d’une mère adorée mais souvenir plus pénible celui-là de sa pauvreté face à ses camarades lycéens, un monde dont il se sent exclu. Longtemps après, il avoue pourtant ressentir « la nostalgie d’une pauvreté perdue » car elle sert, selon lui, à construire la sensibilité.
Il évoque un père mort pour la France à vingt-neuf ans, un premier amour, révélation de la femme, des femmes qu’il aimera séduire toute sa vie. Il évoque l’Espagne dont sa famille maternelle est originaire et ce lien lui offre l’occasion d’une pensée pour les républicains espagnols « échoués » à Argelès - sur - mer entre 36 et 39 qui combattirent pour la France. La France ou plutôt les français qu’il n’aime pas, la classe bourgeoise surtout, tellement vulgaire à ses yeux, qui mène une politique sans idéal, une société dont il se sent « étranger ». La solitude lui semble préférable à leur fréquentation. Il aborde alors la littérature. « Trois ans pour écrire un livre et cinq lignes pour le ridiculiser ». « Paris met en avant une œuvre, le plaisir est ensuite de la détruire ». Cela ne l’empêche pas de recevoir le Prix Nobel en 1957, la reconnaissance à quarante-quatre ans. Son seul regret est donc celui « des années stupides vécues à Paris » quand il aurait pu vivre ailleurs, mais où ? La Grèce peut-être, étincelante. Oui, il aurait aimé vivre là.
Sur le plateau animé par des vidéos, Stéphane Olivié Bisson livre le texte avec une belle élocution. Non, rien de subversif transparait dans les carnets de cet homme de lettres protéiforme, méfiant à l’égard des idéologies mais adepte de tous les combats. Seul se pose sur son époque le regard perçant d’un témoin par excellence. M-P.P. Le Lucernaire 6e.


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