L'AMERIQUE

Article publié dans la Lettre n° 246


L’AMERIQUE de Serge Kribus. Mise en scène Bruno Abraham-Kremer avec Bruno Abraham-Kremer, John Arnold et la guitariste Claire Deligny.
L’Amérique, elle est là, elle nous attend. Cette Amérique d’avant Bush, celle qui faisait rêver, celle des grands espaces sauvages, de la libre entreprise. Enfin à chacun son Amérique. Celle de Jo et de Babar se trouve sur un territoire géographique aux contours modulables, entre Bruxelles et Nice, avec la Tour Eiffel pour cœur. Babar a vingt ans. Il est mal dans ses baskets, dans son âge. Etudiant en médecine, il se cherche, a soif de révolte. Prendre le train pour Paris sans billet, est pour ce petit jeune homme un baroud d’honneur. Il considère Jo avec une admiration de disciple. Jo a vingt-trois ans. Il sait fumer, draguer les filles, ouvrir les portes sans clef, donner des coups et les recevoir. Un gars terrible. Jo entraîne Babar, l’initie aux merveilles de l’interdit. Les deux amis font la route de l’amitié.
Bruno Abraham-Kremer a confié tout un pan de sa vie à Serge Kribus, comme il l’avait fait avec Eric-Emmanuel Schmitt pour « Monsieur Ibrahim et les fleurs du coran ». Il parle de son enfance, de son adolescence et des premiers pas d’un garçon dans la peau d’un homme. L’écrivain et le conteur, main dans la main, trempent leur plume dans l’encrier bleu des souvenirs. Bruno Abraham-Kremer a souhaité avoir un partenaire pour ce road movie théâtral. Pour cette belle histoire d’amitié, il a demandé à son ami et complice John Arnold de le rejoindre dans l' aventure. Les deux hommes se connaissent bien, leur complicité nourrit le spectacle. Ils n’ont ni l’un ni l’autre l’âge de leur rôle. Il est étonnant de voir John Arnold, qui interprète Babar, avoir le regard juvénile de ce jeune homme de vingt ans. Il en a la voix, les attitudes, les élans maladroits. John Arnold est un formidable comédien de composition. Après avoir été Hitler, un dragon, un chinois, il est un jeune homme parfaitement crédible, toujours juste et émouvant. Il nous rappelle Jean-Pierre Léaud dans les 400 coups. Il fait partie du cercle restreint de ces comédiens porteurs d’images, passeurs d’émotions.
Bruno Abraham-Kremer, l’initiateur du spectacle, a réalisé une mise en scène qui change les points de vue du spectateur, multipliant les cadres. Avec une légèreté et une souplesse de scénographie, il offre un panorama à cette histoire rythmée par les sons de guitare électrique de Claire Deligny. L’Amérique est un spectacle tendre, émouvant, aux accents sincères qui jouent une petite musique de l’âme. Studio des Champs-Elysées 8e.


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