À DROITE À GAUCHE de Laurent Ruquier. Mise en scène Steve Suissa avec Francis Huster, Régis  Laspalès, Odile Cohen, François Berland, Jessé Rémond Lacroix, Olivier Dote  Doevi.
                  Fichue  chaudière ! Franck Tierson, comédien de son état, reçoit des amis pour le week-end,  la chaudière est en panne et on est vendredi. Dans la cave, Paul Caillard, le chauffagiste,  ausculte l’appareil vraiment décati qui fait tache entre le congélateur et les  casiers à bouteilles. Il n’est pas optimiste. Franck, bobo de gauche, descend aux  renseignements. Il voit venir l’ouvrier : « vous allez me dire qu’il  faut changer la pièce mais que ça ne se fait plus ce genre de pièce et que  finalement il va falloir changer la chaudière ! » « Je connais  le truc, ça va du jardinier au maçon, en passant par le traiteur et le  garagiste … On nous suce jusqu’à la moelle ! ». Paul le rassure.  Ce n’est pas lui le patron. Quoiqu’il répare sur la chaudière, son salaire est  le même. Franck qui le croyait à son compte lui demande de l’excuser. Il n’est  pas mécontent de cette rencontre. Elle lui permet de faire connaissance avec un  interlocuteur qui ne peut que partager ses opinions politiques. Mais Paul le  détrompe : il ne peut pas être de gauche, il n’en a pas les moyens !  Il vote plutôt à droite. Franck ne comprend pas. C’est justement parce qu’il  n’a pas les moyens et que son patron l’exploite qu’il devrait être de  gauche ! Paul de son côté peine à comprendre qu’un type aussi riche que  Franck puisse être de gauche. Pour lui c’est l’inverse ! « C’est vous  avec tout l’argent que vous devez gagner, les impôts que vous devez payer,  c’est vous qui devriez être de droite ! ». Partisan du partage et interpellé  par l’orientation politique de Paul, Franck débouche l’une de ses meilleures  bouteilles pour poursuivre la conversation, un peu à regret tout de même :  Il faut savoir apprécier un vosne-romanée,  domaine des Perdrix, 2005. Et c’est parti ! Chacun apporte des arguments  d’une logique imparable aux arguments de l’autre. 
                  Un  malaise de Franck et son transport dans la pièce principale, très  « design », conforte le chauffagiste sur l’inadéquation de son client  entre ses opinions politiques et son train de vie… Mais voici l’arrivée du  médecin, grand ami du comédien et en grève contre le tiers payant… par  solidarité ! Paul, de son côté, a appelé son collègue. «… Heureusement que  tout le monde fait pas les trente-cinq heures ! ». Celui-ci arrive  avec un moteur tout neuf. Il est noir mais… n’a pas tout à fait la tête de son  emploi. Après une brève conversation, le docteur Grewitch empoche les 210 euros  de la consultation, néglige de remplir la feuille de sécu et file à son tournoi  de golf. Il prend tout de même le temps d’appeler l’ex-femme et le fils de Franck  qui accourent avec leurs griefs. C’est reparti, mais c’est la chaudière qui  aura le dernier mot…
                  À quelques mois des présidentielles, Laurent  Ruquier pose la question: peut-on encore se positionner à droite ou à gauche ? Il  passe au crible les paradoxes de la politique d’aujourd’hui, déballe les  contradictions qui divisent notre société et en tire une réflexion avec l’humour  qui le caractérise. La mise en scène très enlevée et l’excellente direction  d’acteurs guident des comédiens galvanisés par leur rôle. L’un très excité,  l’autre d’un calme olympien, Francis Huster et Régis Laspalès offrent deux  superbes numéros d’acteurs, aux antipodes l’un de l’autre, tant physiquement  que par leur comportement. M-P P. Théâtre des Variétés 2e.