RESISTING THE PRESENT.
México 2000/2012. 24 artistes

Article publié dans la Lettre n° 338
du 19 mars 2012


RESISTING THE PRESENT. México 2000/2012. 24 artistes. Dès l’entrée de l’exposition, nous sommes informés par le collectif Tercerunquinto, qui a déchiqueté une énorme planche pour faire apparaître « USD 50 000 », qu’il n’y a Aucun jeune artiste qui puisse résister à un « coup de canon » de 50 000 dollars (2011-2012), détournant la formule d’un général mexicain dénonçant la corruption au sein des groupes militaires pendant la révolution mexicaine (1910-1920). En montant l’escalier qui conduit à la salle Dufy, nous sommes subjugués par un ensemble de 58 posters en noir et blanc, Modelling Standard (2010-2011), de deux artistes, Jorge Satorre et Erick Beltrán, sortes de planches de BD très originales, collées de part et d’autre de l’escalier.
L’entrée dans la galerie d’exposition est tout aussi surprenante avec ces 250 cerfs volants noirs, Papalotes negros (Ave de Mal Agüero) (2010), attachées à des pierres provenant en partie d’un immeuble qui s’est effondré en 2011, « flottant » sur nos têtes comme des chauves-souris, œuvre d’Arturo Hernández Alcázar. Celui-ci s’inspire des cerfs-volants qui indiquaient les lieux de réunions secrètes lors de la guerre d’Indépendance mexicaine (1810-1821). Tout le reste de l’exposition est ainsi. Chacun des artistes présents ici s’inspire de l’histoire, de la vie et de la culture de son pays pour illustrer avec ses propres moyens d’expression tel ou tel fait qui l’a marqué.
Nous ne pouvons pas tous les mentionner mais certains sont plus prégnants que d’autres. C’est avec émotion que l’on passe devant les 100 dessins d’Ilan Lieberman, Niño perdido (2005-2009), faits à partir d’annonces d’enfants disparus durant cette période, ou bien le petit personnage en céramique appuyé sur un mur, Pequeño Lamento (2008), de Gonzalo Lebrija. D’autres œuvres nécessitent des explications, généreusement fournies par le musée, pour être compréhensibles. C’est le cas de cette Bibliothèque de l’anarchie et des anarchistes (2009-2010), de Juan Pablo Macias, formé de 200 livres couverts de papier de verre noir, qui évoque la collection du militant anarchiste Ricardo Mestre, dont la « Biblioteca Social Reconstruir », fondée en 1978, est depuis 2009 enfermée dans des caisses, condamnée à l’oubli. C’est aussi le cas du film El Velador (2011) de Natalia Almada qui nous montre un énorme édifice qui est en fait le mausolée d’un narcotrafiquant, nous rappelant ainsi que le président Felipe Calderón a déclaré une guerre sans merci au trafic de drogue, qui a affecté tous les secteurs de la société mexicaine.
En revanche les choses sont claires avec le film El Sicario, Room 164 (2010) de Gianfranco Rosi, qui nous montre un tueur à gage, recherché par ses commanditaires, nous raconter sa vie et ses méthodes de travail ! C’est aussi le cas avec les collages réalisés à partir de photos découpées dans des journaux du monde entier par Jonathan Hernández, Vulnerabilia, qui montrent que nos hommes politiques n’ont aucune originalité et utilisent tous les mêmes gestes, trahissant par là leur insignifiance. La démarche de Diego Berruecos qui a rassemblé 200 images n&b portant sur la campagne de José López Portillo en 1976, La Solución Somos Todos (2011), nous montre le fonctionnement du Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI), qui a régné sans partage de 1929 à 1989. Mieux qu’un long discours !
Ainsi, ces 24 artistes, nés pour la plupart après 1975, à l’exception du chilien d’origine russe Alejandro Jodorowsky, qui vit à Paris mais a réalisé des planches pour une revue mexicaine, lors de son séjour dans ce pays, nous font part de leur inquiétude dans une société soumise à la globalisation. Leurs œuvres nous disent qu’il faut résister dans le présent, « non pas comme un retour sur le passé, mais comme une garantie d’avenir ». De l’art contemporain, riche, varié et clair, comme on l’aime. Musée d’Art moderne de la Ville de Paris 16e. Jusqu’au 8 juillet 2012. Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.mam.paris.fr.


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