PICASSO ET LA GUERRE

Article publié dans la Lettre n°481 du 12 juin 2019



 
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PICASSO ET LA GUERRE. C’est un paradoxe d’organiser une exposition sur un artiste qui n’a jamais participé à une guerre ni même été soldat ! Mais Pablo Picasso (1881-1973) a été le témoin de deux conflits mondiaux, d’une guerre civile dans son pays d’origine, et de nombreux conflits majeurs comme la guerre d’indépendance cubaine (1895-1898) ou la guerre du Vietnam (1963-1975).
Tout jeune il s’intéresse à ce thème, comme on le voit dans la première section, en dessinant Deux soldats à cheval et une tourelle (vers 1894) ou en peignant Épisode de la guerre contre les français (vers 1896). Résidant en France depuis 1900, mais ressortissant d’un pays neutre, il n’est pas mobilisé lorsqu’éclate la Grande Guerre. Picasso ne représente pas ce conflit et continue ses recherches sur le cubisme, la figuration d’inspiration cézanienne et le pointillisme. Néanmoins il s’inquiète pour ses amis, comme Guillaume Apollinaire, auxquels il écrit et donne des nouvelles des uns et des autres. Plusieurs correspondances de ce genre sont présentées dans la deuxième section, « En marge de la Première Guerre mondiale ».
Dans les années 1930, son amitié avec le poète Paul Éluard, proche du parti communiste, et son amour pour Dora Maar, photographe militante, l’engagent à soutenir le Front populaire en France et surtout le Frente Popular en Espagne. La guerre civile l’éloigne définitivement de son pays. Nommé un temps à la direction du musée du Prado à Madrid, il peint, à la suite du bombardement de Guernica, une toile monumentale portant son nom (1937). Des ébauches de la composition ou de détails sont exposées ici.
Durant la Seconde Guerre mondiale, Picasso reste dans son atelier des Grands-Augustins à Paris et se consacre exclusivement à son art. De cette période nous voyons, dans la quatrième section, la célèbre sculpture L’homme au mouton (1943) et des toiles comme Café à Royan (1940), Nu [Dora Maar] (1941), Le Vert-Galant (1943). C’est à cette époque, en 1943, qu’apparaissent des colombes dans un de ses tableaux, L’enfant aux colombes (1943), réminiscence de sa propre enfance, avec un père peintre, spécialisé dans les pigeons. Cette section nous donne aussi un aperçu de cette époque avec des cartes de rationnement, un poste de radio et des revues nazies dont une mentionne « L’art juif, expression morbide de la dégénérescence ou de l’imbécillité » qui inclut aussi l’art de Picasso ! On y voit aussi des documents relatifs à la demande de naturalisation de Picasso et aux enquêtes des renseignements généraux faites à cette occasion.
A la Libération, Picasso devient une célébrité. Il adhère au Parti communiste et répond aux diverses sollicitations dont il fait l’objet que ce soit pour des commémorations ou des commandes. Il réalise des dessins pour illustrer des livres prenant la défense de certaines personnes comme Henri Martin ou Djamila Boupacha ou célébrer des victimes du maccarthisme comme les époux Rosenberg. S’il fait de la paix, comme d’autres artistes communistes, son thème de prédilection, il conserve son style, bien distinct de celui du réalisme soviétique.
La sixième section, « Contre la guerre, pour la paix », nous montre des affiches, des dessins, des sculptures, des foulards, etc. sur le thème de la paix. On y voit l’affiche du premier congrès mondial des partisans de la paix en 1949 avec le motif de la colombe. Artiste de la paix à qui l’URSS décerne deux fois, en 1951 et en 1962, le prix de la paix, Picasso reçoit les commandes de deux grands décors architecturaux, l’un illustrant la guerre et la paix pour l’ancienne chapelle du château de Vallauris, l’autre, La Chute d’Icare, pour le nouveau siège de l’UNESCO.
L’exposition se termine avec des toiles monumentales qui renouent avec ce qui était le grand art jusqu’au XIXe siècle, la peinture d’histoire. Picasso revisite avec talent Goya (Massacre en Corée, 1951) ; Poussin (L’Enlèvement des Sabines, 1962) ; Delacroix (Les Femmes d’Alger, 1954-1955).
Une section au milieu du parcours chronologique présente quinze personnalités liées à Picasso comme Matisse, Gertrude Stein, Marie Laurencin, Blaise Cendrars, Jean Lurçat, Frédéric Joliot-Curie, qui ont exprimé des choix différents de ceux de Picasso face aux conflits du XXe siècle. Une exposition très riche, bien documentée, avec de nombreux panneaux didactiques et un parcours clair et agréable. R.P. Musée de l’Armée 7e. Jusqu’au 28 juillet 2019. Lien : www.musee-armee.fr.


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