PARIS-ATHÈNES
Naissance de la Grèce moderne 1675-1919

Article publié dans la Lettre n°538 du 5 janvier 2022



 
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PARIS-ATHÈNES. Naissance de la Grèce moderne 1675-1919. Le 25 mars 1821, aujourd’hui célébré comme fête nationale, l’archevêque Germanos de Patras appelle les Grecs à se soulever contre l’Empire ottoman, qui a conquis Athènes en 1456. C’est le début de la guerre d’Indépendance. Après la libération d’Athènes, du Péloponnèse, de Missolonghi et de Thèbes, l’indépendance est prononcée le 12 janvier 1822. L’Empire ottoman se lance alors dans une guerre acharnée contre la province grecque, dévastant Souli et massacrant les habitants de l’île de Chios. Les intellectuels et artistes romantiques prennent fait et cause pour cette aspiration à l’indépendance et à la fierté qui anime le peuple grec. Delacroix peint les Massacres de Chios (1824) et surtout La Grèce sur les ruines de Missolonghi (1826), ville où son ami Lord Byron a trouvé la mort, alimentant le philhellénisme européen. Une dynastie européenne est installée en 1832 avec le roi Othon Ier, un prince bavarois. Dès 1834, celui-ci établit sa capitale à Athènes, une ville dont les monuments rappellent aux grecs leur gloire passée. Le nouvel état grec construit son identité culturelle moderne en puisant aux sources du néo-classicisme français et allemand.
Ce rappel de l’histoire grecque récente explique l’enjeu de cette exposition qui commémore le bicentenaire du soulèvement de la Grèce. Elle commémore aussi un autre événement, celui de l’entrée au Louvre le 1er mars 1921 de la Vénus de Milo, découverte un an auparavant par un paysan dans son champ.
Le parcours de l’exposition est chronologique. Il commence par l’évocation de l’ambassade du marquis de Nointel « auprès de la Sublime Porte ». En route pour Constantinople, il fait une halte à Athènes en 1675. Un grand tableau, des vestiges antiques et des relevés du Parthénon évoque cet événement. Mais il n’y a pas que les antiquités grecques, encore quasiment inconnues, à découvrir à cette époque. La Grèce est ce qui reste de l’Empire byzantin (395-1453) dont elle a conservé son identité culturelle, en particulier dans la peinture d’icônes. Nous en voyons de toutes les époques, du XIIe au XIXe siècle, dont une du Greco (1540-1614), la Dormition de la Vierge.
La section suivante est consacrée à la guerre de libération et au philhellénisme (1821-1833). Les commissaires décrivent cette période avec des tableaux évoquant les combats célèbres comme celui de Scio ou le siège de Missolonghi (1825-1826) ou encore la bataille de Navarin (1827) où s’affrontent les flottes ottomanes, russes, anglaises et françaises. C’est aussi la découverte à Milo de la fameuse Vénus, dont on voit une copie en plâtre à côté de l’Hermès de Milo, et aussi de l’expédition scientifique de Morée (le nom que l’on donnait alors au Péloponnèse). À l’exemple de la campagne de Napoléon en Égypte, celle-ci accompagnait le corps expéditionnaire français de 15 000 hommes chargé de libérer la Morée au côté des russes et des anglais (1828 à 1833).
Une fois libérée, la Grèce se cherche une identité. C’est le sujet de la troisième section (1834-1878). Othon Ier s’inspire des costumes grecs pour les vêtements officiels à la cour. Les artistes vont se former à Munich où le néo-classicisme est alors le courant majoritaire. L’urbanisme de la nouvelle ville d’Athènes s’inspire largement de celui imaginé pour Munich. Les architectes puisent dans l’Antiquité classique pour les nombreux édifices publics à construire et dans l’art néo-byzantin pour les édifices religieux, comme la nouvelle cathédrale d’Athènes, avec des décors de mosaïques et des coupoles. C’est aussi à cette époque que s’installent en Grèce des instituts étrangers telle l’École française d’Athènes créée en 1846. Celle-ci réalise des fouilles systémiques (Santorin, Délos, Delphes, Thasos, Philippes, etc.) dont certaines se prolongent aujourd’hui encore.
Après quelques photographies et ouvrages permettant de voir à quoi ressemblait la Grèce à cette époque, nous entrons dans la cinquième section, la plus spectaculaire, celle consacrée aux fouilles archéologiques (1973-1903). Nous y voyons essentiellement des copies en plâtre des grands chefs-d’œuvre de l’art grec, en fait souvent des répliques romaines car l’archéologie grecque est jusqu’alors très limitée, avec des évocations de la fouille de Délos et de la « Grande fouille de Delphes ». Ces copies ont permis à la Grèce de se faire connaître lors des expositions universelles de 1878, 1889 et surtout 1900. Un artiste suisse installé à Athènes, Émile Gilliéron (1850-1924) collabore avec les archéologues en répliquant des objets archéologiques comme le fameux Trésor de Mycènes ou les fresques de Cnossos en Crête.
Ces fouilles permettent aussi de mettre à mal le mythe d’une Grèce « blanche » en découvrant la présence de couleurs sur les fragments d’architecture et de sculptures antiques.
La dernière section traite d’Athènes à la fin du siècle et de l’Art nouveau (1878-1920). Durant cette période, les artistes grecs se forment surtout à Paris et parfois y restent. Ils sont présents dans les expositions universelles. Avec les luttes contre l’Empire ottoman en Grèce du Nord (1897 et 1912-1913), l’attachement au passé byzantin et au patrimoine chrétien se ravive et l’on tente de préserver les vestiges de cette période, objet d’études pour de nombreux chercheurs français. L’exposition se termine avec quelques tableaux du groupe Techne (« art ») (1917-1920) fondé par de jeunes artistes voulant rompre avec l’académisme de l’École des beaux-arts. Une exposition originale, très bien documentée, avec une scénographie tout à fait remarquable et bien appropriée. R.P. Musée du Louvre 1er. Jusqu’au 7 février 2022. Lien : www.louvre.fr.


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