Marie-Antoinette,
métamorphoses d'une image

Article publié dans la Lettre n°491 du 27 novembre 2019



 
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MARIE-ANTOINETTE, MÉTAMORPHOSES D’UNE IMAGE. Avec près de 200 œuvres, objets d’art et archives patrimoniales et contemporaines, extraits de films, accessoires de mode, etc. cette exposition met en lumière le foisonnement de représentations de la reine Marie-Antoinette tant de son vivant qu’après sa mort, le 16 octobre 1793.
La première partie est consacrée aux dernières semaines de la reine, passées à la Conciergerie du Palais dès la nuit du 1er au 2 août 1793. On y voit quelques documents émouvants, extraits de « L’armoire de fer » des Archives nationales, tels l’acte d’accusation de Fouquier Tinville, l’exorde du plaidoyer de Chauveau-Lagarde, l’un de ses deux défenseurs, commis d’office (il n’existe pas d’archives concernant leurs plaidoiries), l’acte de condamnation à mort et l’acte d’exécution. On peut voir aussi la dernière lettre de la reine, sorte de testament écrit à Madame Élisabeth, sa belle-sœur, à qui on ne l’a jamais remis. Des objets évoquent le séjour de la reine dans cette prison : sa chemise, un serre-tête, une chaussure qu’elle aurait perdue en montant sur l’échafaud et un étrange châtelaine-reliquaire (vers 1820) qui contiendrait des cheveux de la famille royale. De cette période on a aussi une multitude de portraits de la reine. La plupart ont été peints par Alexandre Kucharski, nouveau peintre officiel de la reine après l’exil d’Élisabeth Vigée-Lebrun. Des copies et des répliques ont circulé dans toute l’Europe.
Vient ensuite une illustration du grand nombre d’ouvrages consacrés à Marie-Antoinette, la première reine de France, personnage public, à revendiquer un espace privé, ce qui a nourrit jusqu’à nos jours la curiosité pour cette souveraine.
Dans la troisième partie, Antoine de Baecque, le commissaire de cette exposition, nous présente les multiples images de la reine, selon les époques et les événements. À côté des portraits officiels de Vigée-Lebrun on voit ceux peints par Fernando Botero, Marie-Antoinette d’après Vigée-Lebrun (2005), Pierre et Gilles, Marie-Antoinette, le hameau de la Reine (Zahia Dehar) (2014) ou encore Benjamin Lacombe, Marie-Antoinette à la rose (2014). Dès la mort de la reine, une politique d’hommage se constitue. Des documents évoquent ainsi la chapelle expiatoire inaugurée au sein même de la conciergerie puis celle construite à l’emplacement où avaient été inhumés les corps de Louis XVI et de Marie-Antoinette.
Dans l’imagerie d’histoire, c’est le procès et l’exécution de la reine qui constituent la clé de voûte de celle-ci. On admire les portraits de la reine quittant sa prison ou conduite à l’échafaud, d’une grande dignité, ou ceux la montrant avec ce pincement des lèvres, si caractéristique de la morgue royale dénoncée par les républicains. Enfin le cinéma s’est emparé à son tour de son image à travers une cinquantaine de films, la traitant négativement, comme Renoir dans La Marseillaise, ou en faisant d’elle une icône comme Sofia Coppola dans Marie-Antoinette. Des affiches, photos, magazines, dessins et costumes illustrent cette section.
La partie suivante, « Fétiches de reine » est très contrastée. On y voit à travers trois thèmes, la chevelure, le corps de la reine, la tête coupée, le rapport passionnel et conflictuel à Marie-Antoinette. C’est ainsi qu’on admire la reine se coupant elle-même ses cheveux avant son exécution tandis que d’autres se gaussent de ses coiffures extravagantes, en particulier celle dite « à la Belle Poule » qu’elle avait commandée pour célébrer la victoire de ce navire français contre les anglais. Le corps de Marie-Antoinette n’échappe pas au manichéisme opposant la sainte à la prostituée, la femme martyre à la pécheresse. Plusieurs ouvrages illustrés sortis de « L’enfer » de la Bibliothèque nationale de France parlent de Marie-Antoinette, la « Poulle d’Autru/yche », de manière obscène et cela dès 1779 avec Les Amours de Charlot et Toinette. Cela ira en empirant avec, en 1793, La vie privée libertine et scandaleuse de Marie-Antoinette d’Autriche. Enfin, le motif de la tête coupée envahit une imagerie sanglante dont on trouve des exemples encore à notre époque (poupée à tête détachable).
L’exposition se termine sur « Les retours de la reine » et le regain d’intérêt depuis une vingtaine d’années pour Marie-Antoinette, que certains mettent en parallèle avec la mort de Lady Diana Spencer en 1997. Pour le commissaire, cette nouvelle popularité est due au livre d’Antonia Fraser, Marie-Antoinette : The Journey (2001), qui propose le portrait d’une jeune femme décalée par rapport à l’ancien monde de la cour de Versailles, et à son adaptation au cinéma en 2006 par Sofia Coppola. À côté des vêtements dessinés par Milena Canonero et portés dans le film par Kirsten Dunst, nous avons une multitude de croquis, dessins, maquettes de décor, échantillons de tissus etc. d’Anne Seibel, la chef décoratrice du film, montrant le soin apporté à la réalisation de ce film. La mode aussi s’est emparée du personnage de Marie-Antoinette comme on le voit avec de nombreux magazines, un manteau de John Galliano et des chaussures de Christian Louboutin. Enfin, avec « La consommation de la reine », on voit que le merchandising n’est pas en reste, utilisant le personnage de Marie-Antoinette pour vendre toute sorte de produits. Une exposition originale et passionnante. R.P. Conciergerie 1er. Jusqu’au 26 janvier 2020. Lien : www.paris-conciergerie.fr.


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