MAN RAY ET LA MODE

Article publié dans la Lettre n°514 du 23 décembre 2020



 
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MAN RAY ET LA MODE. Quand on appartient au groupe des surréalistes et que son ambition est d’être un peintre reconnu, faire des portraits photographiques et des photographies de mode, pour subvenir à ses besoins, est un brin humiliant. Man Ray n’aurait jamais accepté qu’une telle exposition lui soit consacrée et cela aurait été dommage car il y a des pépites dans ce qui reste de sa production. Aujourd’hui les commissaires qui ont conçu cette exposition, déjà présentée à Marseille durant l’automne 2019, ont bien du mérite car il reste très peu de photographies de mode de Man Ray, les magazines qui les publiaient, et qui en étaient propriétaires, ne les conservaient pas toutes. C’est ainsi que le Centre Pompidou ne possède que celles que les magazines n’avaient pas choisies !
Après une introduction où sont présentées diverses œuvres de Man Ray sans rapport avec la mode (Obstructions, Anatomies, La Voile, Le Cadeau, etc.) le parcours se déroule à travers les sections suivantes : Du portrait des années 1920 à la photographie de mode, La montée de la mode et de la publicité et L’apogée d’un photographe de mode, les années Bazaar.
Dans la première section, on voit surtout des portraits mondains (Anna de Noailles, Peggy Guggenheim, Nancy Cunard, Coco Chanel, …), y compris d’hommes célèbres tels Jean-Charles Worth, Paul Doucet, Lucien Vogel. Mais nous avons aussi quelques photographies de mode et surtout des photographies de personnes qui deviendront célèbres telles Kiki de Montparnasse et surtout Lee Miller, sa muse, compagne et modèle, qui deviendra une photographe renommée, attisant ainsi la jalousie de Man Ray.
À l’origine, les magazines de mode avaient uniquement recours à l’illustration dessinée. Peu à peu elles utilisèrent des photographies mais celles-ci ne rendaient pas vraiment compte des vêtements présentés. Si les commanditaires font appel à Man Ray, c’est pour ses photos sensuelles, voire légèrement scandaleuses, totalement détachées de leur objet publicitaire, comme la fameuse L’Œil (Les Larmes), sensée illustrer une publicité pour le mascara « Cosmécil ». Man Ray photographie aussi des détails du corps humain comme les jambes, la chevelure, les mains, y compris peintes par Picasso. Les magazines, dont on voit de nombreux exemples dans les vitrines, ressemblent alors plus à des revues d’art qu’à des magazines de mode.
De 1934 à 1939, Man Ray passe sous contrat avec le magazine américain Harper’s Bazaar, dont la ligne éditoriale a été entièrement refondue par la nouvelle équipe dirigeante. Maîtrisant totalement son mode d’expression, Man Ray est totalement en phase avec ce magazine et lui remet ses plus belles photographies de mode et de création artistique. Pour cela il fait appel à diverses techniques comme la solarisation, la vue plongeante et la contre-plongée, le recadrage, la transparence, la surimpression, le photomontage. Il utilise même le bélinographe pour transmettre ses photos aux États-Unis par radio. Cette dernière section nous montre aussi les liens étroits qu’il entretient avec Elsa Schiaparelli (1890-1973), la grande rivale de Coco Chanel pendant toutes les années 1930, dont on voit de nombreuses photos, certaines portant encore des marques de recadrage. Il continue aussi à photographier des femmes du monde, pour montrer aux lectrices comment la mode peut être portée et n’hésite pas à faire poser sa nouvelle compagne guadeloupéenne, Adrienne Fidelin, dans sa série La Mode au Congo, publiée avec un texte de Paul Éluard. Une belle exposition, au parcours limpide, enrichie avec de nombreuses vidéos. R.P. Musée du Luxembourg 6e.  Jusqu’au 17 janvier 2021. Lien : www.museeduluxembourg.fr.


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