JEAN FAUTRIER
Matière et lumière

Article publié dans la Lettre n° 452
du 11 avril 2018


 
Pour voir le parcours en images de l'exposition, cliquez ici.

JEAN FAUTRIER. Matière et lumière. Après celles de 1964 et de 1989, voici la troisième rétrospective de cet artiste, peu connu du grand public, présentée par le Musée d’Art moderne. Celui-ci reprend la rétrospective Jean Fautrier qui a eu lieu l’été dernier au Kunstmuseum de Winterthur (Suisse) en y ajoutant d’autres œuvres issues de sa collection, la plus importante (60 pièces) dans les collections muséales, et d’autres prêts de musées français et de collectionneurs privés. Ainsi, avec environ 200 objets, dont près de 160 tableaux, dessins et gravures et la quasi-totalité de ses sculptures, nous avons un panorama très complet de la carrière de cet artiste né à Paris en 1898.
Le parcours est divisé en neuf sections, celles du milieu étant consacrées aux illustrations et dessins. A ses débuts en 1920, Fautrier rejette les avant-gardes de cette époque comme le cubisme, le postimpressionnisme ou le néo-classicisme. Dans ses premières toiles, il peint ses sujets, tels Les habitantes du Tyrol (1921-1922), Portrait de ma concierge (1922) ou Trois Vieilles Femmes (vers 1923) d’une manière réaliste et sarcastique, mettant l’accent sur les traits du visage et sur des mains surdimensionnées. En 1925, inspiré par sa compagne Andrée Pierson, il s’attaque au nu. Nous en avons six qui montrent sa virtuosité picturale.
Cette peinture réaliste et figurative cède rapidement la place à des œuvres d’un monochrome sombre. Durant cette « période noire », sans équivalent à son époque, Fautrier place ses sujets, à peine esquissés, sur des fonds très sombres. Il faut s’approcher de la toile pour discerner un sanglier, un lapin écorché, voire un nu féminin. Ces toiles lui procurent ses premiers succès commerciaux.
En 1928, après un séjour à Port-Cros, sa palette s’éclaircit et son style devient moins figuratif. Néanmoins on reconnaît un paysage, une forêt, des arbres, des oliviers sans avoir besoin des cartels. C’est à cette époque que Fautrier se lance, avec talent, dans la sculpture. On y retrouve la déformation déjà à l’œuvre dans son travail pictural.
Au milieu du parcours, nous avons les épreuves des lithographies sur lesquelles il travailla pour illustrer L’Enfer de Dante. Mais son éditeur, Gallimard, trouva son travail trop abstrait et ne le publia pas. En revanche, nous avons les dessins qu’il réalisa pour illustrer L’Alleluiah de Georges Bataille (1947).
Durant la période 1930-1940, qualifiée « d’années de transition », Fautrier subit les conséquences de la crise de 1929 sur le marché de l’art et doit abandonner son atelier. Il devient moniteur de ski et hôtelier dans les Alpes savoyardes. Néanmoins, il continue de faire des recherches sur la façon de peindre, jusqu’à ne travailler que sur du papier enduit de plâtre, qu’il peint et maroufle ensuite sur une toile.
Cette « nouvelle peinture » trouve sa consécration avec la série des Otages (1940-1945), visages de prisonnier de la Gestapo, exposée fin 1945, qui fait une forte impression sur les visiteurs, tant les couleurs tendres de Fautrier sont embarrassantes.
Par la suite, et jusqu’à sa mort, Fautrier travaille par séries. Nous voyons celle des « objets » (1946-1955), où il représente d’une manière à peine esquissée des boîtes, un encrier, un moulin à café, des verres, etc. Dans ses dernières toiles, Fautrier reprend ses anciens thèmes comme les otages, les nus, les paysages mais, sans les titres, il est presque toujours impossible de deviner le sujet tant sa représentation est éloignée de la réalité formelle. Ce n’est pas de l’abstraction mais on s’en approche. Une exposition qui met bien en valeur cet artiste mort en 1964 et connu pour sa très grande discrétion. R.P. Musée d’Art moderne de la Ville de Paris 16e. Jusqu’au 20 mai 2018. Lien : www.mam.paris.fr.


Pour vous abonner gratuitement à la Newsletter cliquez ici

Index des expositions

Nota: pour revenir à « Spectacles Sélection » utiliser la flèche « retour » de votre navigateur