Parcours en images de l'exposition

LA FABRIQUE DU LUXE
Les marchands merciers parisiens au XVIIIe siècle

avec des visuels mis à la disposition de la presse,
et nos propres prises de vue


Parcours accompagnant l'article publié dans la Lettre469 du 26 décembre 2018

I - Histoire, statuts et organisation de la corporation
 
Affiche à l'entrée du musée
 
Entrée de l'exposition
Scénographie
La corporation parisienne des marchands merciers

Dissous à la Révolution, le système français des corporations règle la vie professionnelle des commerçants d’une même ville, classés en fonction des biens vendus. Les membres de la corporation, obligatoirement de nationalité française et de confession catholique, sont par ailleurs juridiquement protégés et versent une cotisation annuelle, enregistrée auprès de leur maison administrative, ou Bureau. À Paris, les Six Corps forment « une sorte d’aristocratie industrielle » ayant droit de présence aux cérémonies et aux parades de la Ville.

La corporation des merciers, troisième des Six Corps, est attestée dans la capitale dès 1137 et réunit les vendeurs de toutes sortes de marchandises déjà produites ou demeurant à « enjoliver » par l’assemblage. Après trois ans d’apprentissage, l’aspirant peut devenir maître et constituer un stock extrêmement varié, entre objets d’art, ameublement et textiles ; le droit de commercer les pièces « de provenance orientale », mentionné dans leurs statuts en 1324, reste l’une des constantes jusqu’à la fin des corporations, en 1793. Toutefois, la difficulté de définir leur périmètre est perceptible à travers les procès intentés et les éditions régulièrement augmentées de leurs statuts.


 
Chronologie

1137 : Mention la plus ancienne de la corporation des merciers.
1268 : Première édition de leurs statuts.
1292 : Premier recensement : le corps comprend 200 membres actifs.
1324 : Élargissement des statuts comprenant désormais le commerce des « objets de provenance orientale ».
1431 : Création des Six Corps réunissant les plus puissants marchands de la Ville de Paris : drapiers, épiciers, merciers, pelletiers, bonnetiers et orfèvres.
1567 : Offre à Charles IX d’un support logistique d’hommes en armes durant les conflits religieux.
1613 : Nouveaux statuts pour les marchands merciers, enregistrés au Parlement et édictés par Louis XIII.
1629 : Réception des armoiries du corps.
1674 : Support financier à Louis XIV pour la reconquête de la Franche-Comté.
1762 : Financement d’un navire de guerre pour Louis XV durant la guerre de Sept Ans.
1775 : Dernier recensement : 3207 membres actifs.
Texte du panneau didactique
 
Chronologie
Plan présentant les axes principaux du commerce du luxe et la localisation des enseignes présentées en exposition. © Cyrille Suss, 2018.
 
Panneau didactique
 
Scénographie
Nicolas Jean-Baptiste Raguenet. La Joute des mariniers, entre le pont Notre-Dame et le pont au Change, 1756. Huile sur toile.
Musée Carnavalet. © Musée Carnavalet/Roger-Viollet.
II - Enjoliver les objets : l'exemple du « fleurissement »
Scénographie
Enjoliver les objets

Les merciers recourent obligatoirement à d’autres corporations pour livrer des marchandises adaptées à la dernière mode. L’assemblage d’une pièce unique peut ainsi associer des objets importés, des productions de manufactures et des éléments exécutés par un fournisseur à la tête d’ateliers de taille variable. Les grands maîtres entrepreneurs comme l’ébéniste Adam Weisweiler ou les ciseleursdoreurs François Rémond et Pierre Gouthière emploient jusqu’à plusieurs dizaines d’ouvriers, souvent à la journée, pour répondre aux commandes.

Les stocks de certains merciers comprennent aussi des réalisations préfabriquées, prêtes à être posées, destinées à couvrir les besoins urgents d’une clientèle exigeante, désireuse de posséder un accessoire luxueusement monté, vu chez un membre de la famille royale ou auprès d’un amateur. La fleur, que la forme comme le motif rattachent à l’esthétique rocaille, incarne une variation parfaite de cet exercice tant pour le textile que pour les oeuvres d’art.
 
Texte du panneau didactique
 
Vitrine
 
Anonyme. Cage à oiseaux, vers 1750-1751. Fer peint et porcelaine. Musée des Arts Décoratifs. © MAD, Paris.
 
Manufacture de Meissen et manufacture de Vincennes. Candélabre à deux branches garni d’un oiseau et de fleurs, d’une paire, vers 1750. Porcelaine, bronze doré. Musée Cognacq-Jay. © Musée Cognacq-Jay / Roger-Viollet.
 
Anonyme. Fontaine de table, vers 1740. Céladon, bronze doré, porcelaine « blanc de Chine ».
 
Manufacture de Vincennes. Ensemble de fleurs, vers 1748-1755. Porcelaine tendre.
III - Le « goust » des marchands merciers
Scénographie
Le « Goust » des marchands merciers

Parmi les merciers, les marchands de tableaux et d’objets d’art forment une catégorie prestigieuse en raison de la valeur des stocks et de l’emploi de fournisseurs réputés. Les liens solidaires qu'ils nourrissent entre eux ou avec d'autres corporations apparaissent sur les actes notariés relatifs aux carrières des merciers et aux grands évènements de la vie
- mariage et baptême, apprentisssage, association, vente ou décès. Et les inventaires réalisés à ces occasions nous renseignent sur l'articulation de leur réseau.

Si, au premier abord, cette catégorie semble proposer des biens similaires à la vente, certaines spécialités apparaissent toutefois par le biais d’un monopole négocié ou de productions exclusives, commuant la boutique en une véritable marque du goût du mercier. La fidélité de leur clientèle et la notoriété de leur enseigne auprès des voyageurs internationaux reposent ainsi sur la maîtrise du circuit publicitaire et sur la bonne réussite d’entreprises conséquentes en ameublement, surtout pour les membres de la famille royale ou pour la haute aristocratie.


 

Texte du panneau didactique.
 
Anonyme. Rouleau de passementerie, entre 1750 et 1799. Morceau ou fragment (textile), passementerie. Palais Galliera, musée de la Mode de la Ville de Paris.© Palais Galliera/Roger-Viollet..
 
Attribuée à l’atelier blanc et vert (actif vers 1660). Coupe en jade en forme de coquille, 1687. Achetée par Louis XIV au marchand Danet en 1687. Musée du Louvre. © RMN-GP (Musée du Louvre).
 
François Rémond. Paire de bras de lumière dite « petits bras à enfants ». Livrée par Dominique Daguerre en 1789 pour le second cabinet de la reine Marie-Antoinette au château de Marly. Bronze ciselé et redoré, bronze patiné. Château de Versailles et Trianon. © RMN-GP (Château de Versailles et Trianon).
 
Jean-Baptiste Dutertre, Horloger. Pendule à colonne et figures en biscuit de Sèvres, 1771. Livrée par Simon-Philippe Poirier à la Comtesse du Barry. Porcelaine tendre de Sèvres et bronze ciselé doré. Collection particulière. © Photo Studio Sébert.
 
Estampillée Matthieu Criaerd. Encoignure, 1743. Livrée par Thomas-Joachim Hébert en 1743 pour la chambre bleue au château de Choisy. En 1791, restaurée par Guillaume Benneman afin de servir dans le cabinet de Mme Élisabeth à Fontainebleau. Bâti de chêne, placage de bois fruitier, vernis martin, bronze argenté, marbre. Musée du Louvre. © RMN-GP (Musée du Louvre).
Scénographie
 
Martin Carlin. Encoignure livrée par Darnault pour le grand cabinet de Mme Victoire au château de Bellevue, 1785.Ébène, laque du Japon. Musée du Louvre. © RMN-GP (Musée du Louvre).
 
Manufacture royale de porcelaine de Sèvres. Assiette à décor de palmes et d’oiseaux sur un fond vert, faisant partie du « petit service vert » acheté par Louis XV le 9 mars 1758 au marchand mercier Lazare Duvaux. Portant la lettre-date D pour les années 1756-1757. Châteaux de Versailles et Trianon. © RMN-GP (Château de Versailles).
 
Jean Ducrollay. Tabatière, 1756-1759. Ors de deux tons, porcelaine de Sèvres. Musée du Louvre. © RMN-GP (Musée du Louvre).
 
Manufacture royale de porcelaine. Paire de vases « à oreilles », 1754. Porcelaine tendre (Vincennes).
 
Scénographie
 
Manufacture royale de Vincennes. Le Flûteur, un exemplaire vendu par Lazare Duvaux à Mme de Pompadour en 1753. 1751-1752 pour le modèle. Musée des Arts Décoratifs. © MAD, Paris.
Philippe-François Julliot (1755-1836). Projet de commode, 1784. Aquarelle sur papier.
 
Facture dont l’en-tête mentionne Daguerre et Lignereux, 29 octobre 1777. Manuscrit. Montigny-le-Bretonneux, Archives départementales des Yvelines.
 
Anonyme. Lanterne magique, vers 1790-1800. Acajou, bronze patiné et doré, porcelaine de Wedgwood. Collection particulière. DR.
IV - Stratégies : innovation, publicité et gestion de stock
Scénographie

Stratégies

Les diverses stratégies développées par les marchands merciers pour se faire connaître et vendre leurs produits passent non seulement par la création d’une identité visuelle, de l’enseigne à la carte de visite, par l’utilisation d’un système publicitaire forgé par les gazettes, les journaux et les guides, mais aussi par leur capacité à innover en commercialisant rapidement des formes nouvelles adaptées aux tendances.

Dans un secteur très concurrentiel, les marchands merciers doivent faire preuve d'une stratégie permanente. L'implantation de leurs lieux de vente constitue une réflexion cruciale pour être au coeur des réseau de leurs fournisseurs et de leur clientèle. La mise en oeuvre du marketing également, à l'appui de coup publicitaire (Watteau peignant pour son ami Gersaint une enseigne en opposition avec la pratique réglementaire), d'exclusivité négociée avec des importateurs ou des manufactures, d'identification de clients prestigieux dans leurs réclames.

Paris réunit les ingrédients indispensables d'un marché du luxe et du demi-luxe : capitaux, clientèle nombreuse, fournisseurs hautement qualifiés, réseau artistique forgé par les académies et les écoles, proximité avec une cour friande de nouveautés.

 

La conception des projets décoratifs

À qui revient la paternité d’une forme nouvelle ? La répartition des rôles entre l’ordonnateur d’un projet et l’exécutant n’est pas toujours claire : en témoignent les dessins, tantôt signés par un artiste, tantôt revêtus de la mention d’un mercier, tantôt restés anonymes.

Des commandes sont parfois passées auprès de dessinateurs, dont certains sont considérés comme des concepteurs de décors, tel Jean-Démosthène Dugourcq. Le texte du frontispice du Recueil de Fleurs de Caprice par Jean Pillement cite un marchand d'étoffes, tandis que l'association entre des écrans de feu et Louis Bonaventure du Bois, un autre marchand, est expressément citée dans leur gravure par Antoine Aveline.

Le rôle des merciers semble souvent conséquent : tandis que Philippe-François Julliot signe un superbe projet aquarellé de meuble d’appui en 1784 (aujourd’hui conservé au musée des Arts décoratifs), le nom de Dulac reste associé à une forme de vases de la manufacture royale de Sèvres, avec laquelle ce marchand a un contrat d’exclusivité. Cependant, nombre de projets demeurent aujourd’hui en quête d’attribution.

Texte du panneau didactique
 

Texte du panneau didactique

 
Anonyme. Projet de lustre et applique, vers 1775. Plume, encore brune, lavis brun, rehauts de bleu. Musée des Arts Décoratifs. © MAD, Paris.
 
Canapé trois places, XVIIIe siècle. Plume, encre noire, lavis bistre. Musée des Arts Décoratifs. © MAD, Paris.
 
Jacques de Lajoüe. Projet de cadre à décor rocaille, XVIIIe siècle. Plume, lavis brun. Musée des Arts Décoratifs. © MAD, Paris.
 
Manufacture royale de porcelaine de Sèvres ; Jean Alexandre Dulac. Paire de vases-girandoles dits « vases Dulac », vers 1770. Porcelaine de Sèvres, bronze doré. Châteaux de Versailles et Trianon. © RMN-GP (Château de Versailles).
 
Anonyme. Enseigne Au Petit Dunkerque, 1767. Fer étiré, repoussé, découpé, polychromie, rehauts d’or.
 
Jean-Antoine Watteau. Etude pour « l’Enseigne de Gersaint », 1720. Sanguine, pierre noire et craie blanche sur papier. Musée Cognacq-Jay. © Musée Cognacq-Jay/Roger-Viollet.
V - Poursuite de l'exposition dans les collections permanentes
 
Adam Weisweiler (1744-1820). Bonheur-du-jour, vers 1780. Acajou, bronze doré, marbre.
 
Johann Joachim Kändler (1732-1813) et Peter Reinicke (1715-1768) pour la Manufacture de Meissen, Manufacture de Vincennes. Éléphant portant un pot-pourri, vers 1750. Porcelaine de Saxe émaillée, porcelaine tendre, bronze doré (monture parisienne).
 


Anonyme. Phénix posé sur un rocher, vers 1750. Porcelaine chinoise émaillée, bronze doré (monture française).
 
Attribué à Adam Weisweiler (1744-1820). Console-desserte, vers 1785. Acajou, bronze doré, marbre.
VI - Reconstitution autour de L'Enseigne de Gersaint dans le grand Comble.

Adaptation de l'enseigne de Gersaint en décor. Antoine Watteau. L'Enseigne de Gersaint, 1720. Huile sur toile, 166 x 306 cm. Berlin, château de Charlottenbourg.

Véritable publicité pour l'ensemble des acteurs du fait de son sujet et de sa localisation sur l'un des principaux axes parisiens, l'enseigne devenue oeuvre était encore mentionnée douze ans plus tard dans le Mercure de France. Acquise par un membre du Parlement de Paris, elle rejoignit les collections de Jean de Julienne - un amateur de Watteau qui en fit réaliser une gravure à l'appui de Gersaint, qui rempli alors le rôle d'éditeur - avant d'être cédée au comte de Rothenburg et d'entrer dans les collections de Frédéric le Grand, roi de Prusse..

 
Panneau didactique