DANS LES MAILLES DU FILET

Article publié dans la Lettre n° 392
le 8 février 2016


 
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DANS LES MAILLES DU FILET. Cette exposition nous présente cette extraordinaire aventure maritime qui se déroula durant cinq siècles dans l’Atlantique Nord-Ouest, dans les eaux de Terre-Neuve, du Labrador, de l’Islande et du Groenland. Chaque année des milliers de marins-pêcheurs partaient des ports de Bretagne et de Normandie, en ce qui concerne la France, pour aller pêcher un poisson miraculeux, la morue. Gadus morhua est un poisson vorace pouvant atteindre un mètre cinquante de long et quatre-vingt-dix kilos. Autrefois les prises de trente kilos étaient fréquentes. Aujourd’hui les poissons pêchés ne font que trois à cinq kilos. En effet, pendant longtemps, on a cru que cet or blanc était inépuisable. Certains ont bien lancé des messages d’alertes comme on le lit dans un article publié en 1905, mais rien n’y fit et les captures atteignirent une valeur de près de deux millions de tonnes en 1968 pour s’effondrer rapidement jusqu’à la mise en place de quotas par le Canada en 1977 et l’interdiction totale de pêcher la morue dans les eaux de Terre-Neuve et du Labrador à partir de 1992-1993, marquant la fin de la « grande pêche ».
Si les arts et la littérature s’intéressèrent peu à cette pêche jusqu’au XVIIIe siècle, en revanche, au XIXe siècle, nombre d’artistes représentèrent la vie de ces marins travaillant 18 heures par jour dans le froid et le vent, pêchant depuis de frêles embarcations, les doris, et cela jusqu’à six mois d’affilé. Ils mirent aussi en exergue la vie à terre avec les pardons, ces cérémonies où l’on bénissait les bateaux qui allaient partir, la vie des femmes de marins qui devaient suppléer aux travaux normalement dévolus aux hommes durant leur absence, le retour ou non des bateaux, ou encore le sort de ces veuves de marins, jetant des couronnes dans la mer ou priant devant le « mur des disparus ». Edmond Rudaux (1840-1908), Albert-Guillaume Démarest (1848-1906), Paul Signac (1863-1935), Henri Dabadie (1867-1949), Mathurin Méheut (1882-1958), Yvonne Jean-Haffen (1895-1993), Albert Brenet (1903-2005), dont on voit des œuvres, ont été particulièrement inspirés par cette aventure. En littérature c’est Pierre Loti, lui-même officier de marine, qui popularise ce sujet avec Pêcheur d’Islande (1886) où il idéalise le pêcheur, héros vertueux luttant contre les éléments et sa femme, figure romantique guettant le retour de son mari. Ce roman fut porté à l’écran par de nombreux réalisateurs. Nous voyons ainsi les affiches des films tournés, entre autres, par Jacques de Baroncelli (1924), Pierre Guerlais (1933), Victor Fleming (1937) et Pierre Schoendoerffer (1958).
La dernière partie de l’exposition, essentiellement didactique, est consacrée aux méfaits de la surpêche, dont la « grande pêche » est la triste illustration, et aux pistes qu’il faudrait suivre pour une pêche durable : meilleure connaissance de la ressource, recherche de techniques de pêche plus sélectives, réduction de la consommation énergétique des bateaux, sensibilisation des pêcheurs aux principes de pêche durable, traçabilité et labellisation des pêcheries et des produits, établissement et respect de réglementations et de quotas par tous les états, lutte contre la pêche pirate. Un panneau est consacré à l’aquaculture, une « vraie fausse bonne solution » puisqu’il faut de 1,5 à 4 kg de poissons sauvages pour nourrir 1 kg de poissons d’élevage ! On note que 88% de l’aquaculture mondiale est produite en Asie et 62 % en Chine. Comme d’habitude dans ce musée, des activités sont prévues pour les enfants au sein de l’exposition. Un sujet intéressant et d’actualité dans une très belle scénographie. Musée national de la Marine 16e. Jusqu’au 26 juin 2016.
Lien : www.musee-marine.fr.


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