COURANTS VERTS
Créer pour l'environnement

Article publié dans la Lettre n°512 du 25 novembre 2020



 
Pour voir le parcours en images et en vidéos de l'exposition, cliquez ici.

COURANTS VERTS. Dans son introduction, Paul Ardenne, le commissaire, écrit que cette exposition a pour objectif de témoigner d'un processus d'adaptation. Il ajoute que « L'anthropocène, ce moment de l'histoire où les activités humaines perturbent en profondeur les processus naturels, nous impose de nouveaux comportements pratiques, un rapport repensé à l'environnement, une mentalité refondée ». Pour lui « l'art contribue à affermir cette mutation essentielle caractéristique de l'actuelle transition climatique. Il appelle à réfléchir, à se rendre intellectuellement disponible aux enjeux cruciaux que posent l'actuel réchauffement climatique, l'effondrement de la biodiversité, la pollution atmosphérique, terrestre et marine ainsi que l'épuisement des ressources terrestres ».
Pour illustrer ses propos, il nous présente les œuvres de 21 artistes de 11 nationalités différentes, réparties en trois groupes selon leurs objectifs réels ou supposés. Malheureusement, la configuration des lieux, sur deux niveaux autour d’un patio, et leur relative petitesse, ne permet pas de présenter les œuvres dans un ordre logique ni, pour nous, d’en rendre compte en suivant le parcours imposé.
Dans le premier groupe, « Avertir », la position de l’artiste est celle d’une sentinelle, d’un lanceur d’alerte. C’est ainsi que Christiane Geoffroy, dans une peinture in situ, La dérive des continents (2010-2020) représente les états avec la taille correspondant au rapport entre leur taux d’émission de CO2 et leur PIB. L’Amérique du Nord est énorme alors que l’Afrique se voit à peine ! Le Cambodgien Khvay Samnang présente la vidéo et des photographie d’une performance au cours de laquelle il a parcouru, nu mais enduit de sève blanche d’hévéa, les plantations de cet arbre à caoutchouc qui ont détruit la biodiversité et amené la pollution (Rubber Man, 2015). La française Sarah Trouche, quant à elle, nue et le corps enduit de peinture bleue, agite deux drapeaux du Kazakhstan, juchée sur une épave de bateau, là où se trouvait jadis la mer d’Aral, avant que la culture de coton l’assèche complétement (Aral Revival, 2013). C’est l’œuvre la plus forte dans ce premier groupe.
Le deuxième thème, « Agir » montre les travaux volontiers modestes, de certains artistes « écologiques » qui agissent localement en interaction avec des scientifiques, des territoires, des habitants, des communautés. C’est le cas de Joseph Beuys (1921-1986) qui, au cours d’une performance collective, planta 7000 chênes à Cassel, en Allemagne, là où se tient la plus grande manifestation d’art contemporain au monde avec la biennale de Venise. De même, plus modestement, Thierry Boutonnier prélève lors de ses marches urbaines, de jeunes pousses d’arbres qu’il cultive, en vue de les replanter dans les différentes forêts urbaines de la capitale (Recherche Forêt). Dans le même esprit, Jérémy Gobé, avec Corail Artefact, invente, avec le concours de scientifiques, une résille textile biodégradable, dont la vocation est de préserver les coraux existants tout en permettant la réimplantation d’une vie sous-marine. Ses sculptures à base de coraux et de dentelles sont magnifiques. Les œuvres des quatre autres artistes de ce groupe sont moins convaincantes.
Le dernier thème « Rêver » est le mieux illustré, ce qui est assez naturel pour des artistes ! La première œuvre que l’on voit en suivant le parcours est une Robe de mariée, créée spécialement pour cette exposition par la canadienne Nicole Dextras, entièrement réalisée avec des végétaux, dans une tonalité verte. Au mur sont accrochées des photographies d’autres réalisations de cette artiste très originale. Un peu plus loin, nous avons un panneau montrant les recherches de l’américain Sam Van Aken qui souhaite donner corps à l’Arbre de l’Éden, avec ses quarante fruits différents. Pour cela, il pratique des greffes tous azimuts afin de créer un arbre hybride dont les fruits pourraient être de plusieurs variétés (pomme, prune, abricot, poire, etc.) sur la même branche ou des branches différentes du même arbre.
En redescendant, on passe devant la maquette du SeaOrbiter et divers documents sur ce projet de l’architecte Jacques Rougerie, en collaboration avec Jacques Piccard et Jean-Loup Chrétien. Ils souhaitent réaliser un navire d’exploration des océans, conçu pour dériver au gré des courants marins et permettre l’exploration des grandes profondeurs.
Le parcours se termine avec le Shared Propulsion Car (2007) du canadien Michel de Broin. Cet artiste a retiré d’une Buick Regal 1986 tout ce qu’il jugeait superflu (moteur, suspension, transmission, système électrique, etc.) et l’a équipé de quatre pédaliers autonomes permettant aux passagers de former un groupe propulseur capable d’atteindre 15 km/h. Une vidéo montre l’artiste et des acolytes rouler dans Toronto avec ce véhicule et se faire arrêter par la police. Cette performance donna lieu à un procès !
Une exposition inégale, pas toujours très convaincante, mais où l’on apprécie un certain nombre d’œuvres vraiment intéressantes. R.P. Espace Fondation EDF 7e. Jusqu’au 31 janvier 2021. Lien : fondation.edf.com.


Pour vous abonner gratuitement à la Newsletter cliquez ici

Index des expositions

Accès à la page d'accueil de Spectacles Sélection