LES CONTES CRUELS DE PAULA REGO

Article publié dans la Lettre n° 467
du 28 novembre 2018


 
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LES CONTES CRUELS DE PAULA REGO. C’est la première grande exposition dans un musée français de cette artiste très reconnue au Portugal, où elle est née en 1935, et en Grande-Bretagne où elle a fait ses études et où elle vit d’une manière permanente depuis 1976. Dès l’entrée, on est frappé par la puissance de son dessin et la représentation de ses personnages, avec des formes volumineuses, même lorsqu’il s’agit de petites filles jouant avec un chien (série des Girls and Dog, 1986). Après ce prologue, on a un deuxième choc avec « L’atelier ». En effet, Paula Rego récupère et réalise, souvent en papier mâché, toutes sortes d’accessoires et de personnages, parfois avec l’aide de sculpteurs comme Ron Mueck, par ailleurs, son gendre. Elle utilise ensuite ces objets pour créer des saynètes qui s’intégreront dans ses tableaux. Pour l’exposition, elle a réalisé quatre installations, assez dérangeantes, qui ne laissent pas indifférents.
L’exposition se déroule ensuite selon un parcours chronologique. Avec « Rondes et comptines », on voit quelles sont les sources d’inspiration de Paula Rego. Elle connaît tout de la littérature enfantine et du roman. Cela va des Petites Filles modèles de la comtesse de Ségur à Jane Eyre de Charlotte Brontë, son livre de chevet, en passant par Alice au Pays des merveilles (Lewis Carroll), Les Aventures de Pinocchio (Carlo Collodi, adapté par Wall Disney), Peter Pan (J.M. Barrie) et même Le Chef-d’œuvre inconnu d’Honoré de Balzac. Elle connaît bien sûr les illustrations qui en ont été faites par des artistes tels Gustave Doré, mais elle s’inspire aussi de certaines œuvres  de Goya, Daumier, Redon et bien d’autres et son univers pictural dialogue avec la peinture d’histoire et le réalisme. Il y a ainsi une forte ressemblance entre la gravure de Goya, Disparate feminino, une gravure de la série Los Proverbios (1864) et son premier tableau de grande dimension, La Danse (1988), surtout dans ses dessins préparatoires.
Dans les salles suivantes, on aborde tout d’abord le thème des « Punitions et réprimandes » avec des toiles comme Les Bonnes (1987) ou La Famille (1988), peintes avec des allusions à son mari, gravement malade à cette époque (il est mort en 1988). Puis, avec « Contes et fantaisies », à côté de gravures évoquant Peter Pan, nous avons de très grands pastels sur Pinocchio (La Fée Bleue chuchote à l’oreille de Pinocchio, 1995 ; Gepetto lavant Pinocchio, 1996), pour lesquels elle a fait poser toute sa famille, y compris Ron Mueck qui réalisa le Pinocchio que l’on voit dans le tableau et qui trône ici au milieu de la salle, l’une des premières œuvres hyperréalistes de son gendre. Enfin, avec « Animaux et animalité », nous voyons comment Paula Rego représente des chiens ou des autruches, celles du film Fantasia de Walt Disney, sous les traits de femmes qui adoptent les mêmes attitudes que ces animaux. C’est saisissant !
Viennent ensuite, avec « Héroïnes », des pastels, sa technique de prédilection, mettant en scène des sujets comme Ange (1998), Jane Eyre (2002), un grand triptyque, ou La Fête (2003). Puis ce sont d’autres grandes compositions réunies sous l’intitulé « Cycles et figures ». On y trouve le Triptyque l’homme-oreiller (2004), le Triptyque du pêcheur (2005) et L’épouvantail et le porc (2005). Tous ces tableaux sont marqués par une grande théâtralité, une abondance d’objets et des scènes se déroulant en arrière-plan.
L’exposition se termine par deux tableaux de 2011 évoquant la nouvelle de Balzac, Le Chef-d’œuvre inconnu, qui avait inspiré à Jacques Rivette La Belle Noiseuse (1990), L’Histoire de Balzac et Painting Him Out. La composition de ces tableaux est complexe et fait intervenir non seulement un peintre, une femme bien sûr, mais d’autres femmes réalisant leur autoportrait avec, dans le fond, une femme qui accouche et un incendie dominé par un phénix. Une exposition tout à fait remarquable nous permettant de découvrir cette grande artiste. R.P. Musée de l’Orangerie 1er. Jusqu’au 14 janvier 2019. Lien : www.musee-orangerie.fr.


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