CHRISTO ET JEANNE-CLAUDE. PARIS !

Article publié dans la Lettre n°507 du 16 septembre 2020



 
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CHRISTO ET JEANNE-CLAUDE. PARIS !  Christo Vladimirov Javacheff et Jeanne-Claude Denat de Guillebon sont nés tous deux le 13 juin 1935, lui à Gabrovo, en Bulgarie, elle à Casablanca, au Maroc, où son père, futur directeur de l’École Polytechnique, était en poste. Fuyant le régime communiste de son pays natal en 1956 à la faveur d’un séjour à Prague où vivent ses parents, Christo gagne Genève, puis Paris où il arrive en mars 1958. Pour subsister, il lave des voitures et fait des portraits qu’il signe Javacheff, réservant son nom d’artiste, Christo, à des œuvres plus ambitieuses. C’est ainsi qu’à la demande du coiffeur Jacques Dessange, il fait le portrait d’une de ses bonnes clientes, qui n’est autre que Brigitte Bardot. C’est grâce à ces travaux alimentaires qu’il fait la rencontre de Jeanne-Claude alors qu’il peint le portrait de sa mère en 1958. Celle-ci deviendra non seulement sa femme mais aussi sa collaboratrice artistique à partir des grands projets d’empaquetage, même si son prénom ne fut que tardivement associé à celui de Christo.
La présente exposition n’est pas une rétrospective. Elle ne s’intéresse qu’aux travaux de Christo et Jeanne-Claude réalisés à Paris. La première partie passe en revue la période 1958-1964 avant l’installation définitive du couple à New York. La seconde partie est une exposition-dossier consacrée à l’Emballage du Pont-Neuf à Paris, comme celles que le duo d’artistes avait réalisées pour autofinancer leurs grands projets : Kunsthalle, Berne ; Museum of Contempory Art, Chicago ; Wrapped Coast, Sydney ; Valley Curtain, Colorado ; Running Fence, Californie ; Surrounded Islands, Floride ; etc.
La première partie est particulièrement intéressante car c’est la moins connue. Sophie Duplaix, la commissaire, a beaucoup insisté auprès de Christo pour la présenter. On y découvre les premières œuvres de celui-ci, comme le portrait de la mère de Jeanne-Claude ; ses premières surfaces d’empaquetage ; ce qu’il appelait son « inventaire », à savoir des empilages de boîtes, de bidons, etc., recouverts de tissu, rigidifiés par de la laque et entourés de ficelle ; ses cratères, toiles sur lesquelles il fixait des boîtes recouvertes de sable, de peinture, etc. leur donnant un aspect lunaire ; et surtout ses premiers empaquetages.
L’idée d’empaqueter lui est venue peu à peu. Par cette approche, il dissimule des objets à l’intérieur d’un emballage savant fait de toiles, parfois transparentes comme pour ses tableaux, et de cordes. Parfois, le spectateur peut deviner l’objet ou les objets ainsi emballés comme avec ce Petit cheval emballé. D’autres fois, on ne sait pas s’il y a vraiment quelque chose sous l’emballage.
Cette première partie se termine avec des vitrines et des devantures de magasin. Ici c’est la politique du gouvernement de Sofia qui a inspiré Christo. En effet, avec d’autres étudiants des beaux-arts, il était chargé de camoufler, avec des toiles peintes, certains bâtiments délabrés le long de la voie de l’Orient Express, pour mettre en valeur le pays. Ses vitrines participent de ce principe.
Le visiteur est alors invité à visionner Christo in Paris, 1990, un film de près d’une heure d’Albert et David Maysles, collaborateurs de Christo, qui retrace sous toutes ses formes l’aventure de l’empaquetage du Pont-Neuf de 1975 à 1985.
La deuxième partie de l’exposition montre justement les difficultés d’un tel projet. Choix du site, discussions avec les autorités et les riverains, lobbying jusqu’aux autorisations finales, celle du maire, Jacques Chirac, dont Balladur, son conseiller, était opposé au projet, celle du préfet de police, à qui Mitterrand fera donner l’ordre d’accepter le projet, etc. Des documents de toutes sortes sont présentés. Photos de Wolfgang Volz, autre collaborateur de Christo, des réunions, des préparatifs, de la réalisation de l’empaquetage du pont, souvent spectaculaire, et enfin du pont emballé, resplendissant sous les rayons du soleil. Parmi les documents, on voit, par exemple, que l’empaquetage a nécessité 126 journées de guides de haute montagne pour tendre les toiles en compagnie d’élagueurs, d’hommes-grenouilles et de centaines d’autres spécialistes.
L’exposition montre aussi des dizaines de dessins préparatoires faits par Christo, des échantillons du matériel utilisé pour emballer le pont sans le détériorer et la maquette exposée dans une vitrine de la Samaritaine en octobre 1981 pour montrer le projet aux passants. Une exposition magistrale sur cet artiste mort le 31 mai dernier, alors que l’exposition n’avait pas pu être ouverte à cause de la pandémie de Covid-19. L’exposition évoque aussi son dernier projet, l’Empaquetage de l’Arc de Triomphe de l’Étoile, qu’il devait réaliser en septembre 2021. R.P. Centre Pompidou 4e. Jusqu’au 19 octobre 2020. Lien : www.centrepompidou.fr.


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