Parcours en images de l'exposition

BASQUIAT
SOUNDTRACKS

avec des visuels mis à la disposition de la presse
et nos propres prises de vue

Parcours accompagnant l'article publié dans la Lettre n°574 du 12 juillet 2023




Titre de l'exposition
 
Basquiat Soundtracks est la première exposition consacrée au rôle de la musique dans l’art de Jean-Michel Basquiat (1960-1988), artiste parmi les plus fascinants du XXe siècle. Né à Brooklyn, de père haïtien et de mère portoricaine, Basquiat a baigné dans l'effervescence musicale de New York à la charnière des années 1980, marquée par l'émergence de nouvelles formes urbaines telles que la no wave et le hip-hop. Puissante et audacieuse, son expressivité s'est développée en prise avec ce paysage sonore, donnant naissance à une œuvre qui doit aussi bien à l’art de la rue qu'à la tradition occidentale, questionnant les conventions esthétiques et révélant une sensibilité tout à la fois critique et poétique.
Grand amateur de musique, Basquiat possédait, dit-on, une collection de plus de 3000 disques allant du classique au rock en passant par le zydeco, la soul, le reggae, le hip-hop, l'opéra, le blues et le jazz. On rapporte que, dans son atelier, plusieurs sources pouvaient coexister simultanément. Cependant, la musique a tissé bien plus qu'un fond sonore à sa pratique. Commençant par une évocation, riche d'archives, des scènes musicales fréquentées par l'artiste à New York dans les années 1970 et 1980, l'exposition met en lumière ses expériences en tant que musicien et producteur de disque. Explorant en détail son imaginaire, elle examine les nombreuses références qui parsèment son travail, révélant combien ses représentations sont informées et ses processus de composition influencés par la musique. La manière dont celle-ci s'inscrit dans ses œuvres témoigne de l'intérêt profond de Basquiat pour l'héritage de la diaspora africaine et de sa conscience aiguë des enjeux politiques liés aux questions raciales aux États-Unis. La musique lui permet ainsi de célébrer la créativité artistique noire tout en pointant les complexités et les cruautés de l'histoire. Elle offre une clé d'interprétation à son œuvre qui, dans son auto-invention, est parvenue à intégrer le beat d’une époque, le blues d’un peuple, le geste du sampling et les symphonies épiques d'une modernité mouvementée.

Exposition co-organisée avec le Musée des beaux-arts de Montréal

Affiche de l'exposition
 
Texte du panneau didactique.


1 - NEW YORK NEW WAVES
Basquiat et les musiques de son temps

Scénographie

Le talent de Jean-Michel Basquiat émerge à New York à la toute fin des années 1970, au sein d’une communauté artistique parmi laquelle la pluridisciplinarité est de mise. Marquée par la radicalité du punk et l'exemple d’Andy Warhol, par le rejet de l’abstraction et du minimalisme ainsi que le refus du conformisme social, cette nébuleuse underground explore le cinéma, la poésie, la photographie, la peinture, la performance, la mode et plus particulièrement la musique. Poète, styliste, auteur d'assemblages d'objets trouvés, Basquiat est ainsi musicien avant d'être pleinement peintre: le groupe Gray, dont il est le cofondateur et leader officieux, partage la scène avec des formations phares de la no wave telles que DNA ou The Lounge Lizards, dont les partis pris esthétiques ne sont pas sans écho avec l’œuvre plastique de Basquiat. Parallèlement, celui-ci subit de plein fouet une autre vague musicale qui, à partir de 1980, déferle sur Manhattan depuis les quartiers du Bronx et de Harlem où elle a éclos: la révolution culturelle du hip-hop qui, uptown, a engendré de nouvelles façons de danser, de faire de  la musique et de peindre. Proche de plusieurs acteurs majeurs du mouvement comme Fab 5 Freddy, Rammellzee ou Toxic, Basquiat produit et réalise en 1983 un titre de rap, Beat Bop, et fréquente les soirées où DJ, MC et graffeurs révèlent leur créativité. Dans ses toiles se manifestent alors, notamment par le recours à la photocopie, des procédés d'échantillonnage et de collage comparables à ceux au fondement du hip-hop.

 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Michel Basquiat. Anybody Speaking Words, 1982. Private collection. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York. Photo Fotoearte.

Le contexte socio-économique de New York à la fin des années 1970 permet l’éclosion, dans la partie sud de Manhattan, de plusieurs boîtes de nuit et lofts d'artistes. Les lieux de cette scène downtown servent de repaires à une communauté qui cherche à repenser ses pratiques et à ramener l’art à la vie, et qui trouve entre leurs murs des espaces de sociabilité, d'expérimentation et d'exposition. En 1979 et 1980, Basquiat fréquente ainsi assidûment - outre le Mudd Club où il dit avoir «passé toutes [ses] nuits pendant deux ans» - le CBGB, épicentre de la scène punk rock; le Club 57, espace de performance alternatif ; le TR3, où les groupes no wave alternent avec des formations de free jazz et des projections de cinéma expérimental; le Squat Theatre, lieu d'avant-garde théâtrale et musicale; ou encore A's, le loft où ont lieu le mercredi des soirées pluridisciplinaires au cours desquelles Basquiat rêve, avec le chanteur Alan Vega, d'une «symphonie métropolitaine» orchestrée à partir de bruits de la ville.

 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Michel Basquiat. Leslie, 1982. Crayon gras sur papier. Collection particulière.

Qualifiée par le créateur Jean Paul Gaultier de «premier mannequin androgyne», habituée du Mudd Club à New York et du Palace à Paris, protégée de William S. Burroughs dont elle a été un temps la secrétaire, Leslie Winer a entretenu une relation avec Basquiat. Lu renversé, le numéro de téléphone figurant dans l'angle inférieur droit du dessin constitue une transposition phonétique de son prénom («LESS-LEE»).
Scénographie
 
Jean-Michel Basquiat. Lee Harvey, 1979. Technique mixte, peinture en aérosol et collage de papier. Collection Hilary Jaeger.

Cette œuvre est ici présentée au public pour la première fois depuis l'époque où elle a été accrochée au TR3 - boîte de nuit essentielle bien qu'éphémère de la scène downtown, dont Basquiat avait décoré le bar et la cabine du DJ de peintures murales désormais disparues. Il réalise ce portrait de Lee Harvey Oswald, assassin présumé de John Fitzgerald Kennedy, en mettant en abyme au moyen du collage une célèbre photographie qui a valu à son auteur, Bob Jackson, le prix Pulitzer en 1964. Il réutilisera cette œuvre sous une forme photocopiée et peinte pour créer l’une des cartes postales qu'il vendait devant le Museum of Modern Art de New York.
 
Man Made, alias Jean-Michel Basquiat. Sans titre (Logic), vers 1979. Sweat-shirt en coton peint à la main. Collection Anna Taylor Delory.
Scénographie
 
Jean-Michel Basquiat dansant au Mudd Club, New York, 1979. © Courtesy of Nicholas Taylor.
 
Jean-Michel Basquiat. Untitled (Sheriff), 1981. Collection Carl Hirschmann. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.
Maripol. Sélection de polaroïds, 1978-1988
Maripol. Sélection de polaroïds, 1978-1988
Maripol For Special Effects

L'artiste française Maripol s'est imposée comme l'une des personnalités phares de la scène downtown peu après son arrivée à New York avec le photographe Edo Bertoglio en 1976. Elle rencontre Basquiat en 1979 au Mudd Club, dont elle est une habituée. En tant que styliste, elle contribue à façonner le look de Madonna, notamment à l'époque de l'album Like a Virgin (1984). Munie de son appareil photo, Maripol a immortalisé les visages des protagonistes des nuits new-yorkaises sous la forme de polaroïds, dont une sélection est exposée ici. Ayant œuvré en 1980 à la production de New York Beat, réalisé par Bertoglio et dans lequel Basquiat tient le rôle principal, elle a concouru avec le scénariste Glenn O'Brien au sauvetage du film resté inachevé, finalement présenté au public en 2000 sous le titre Downtown 81.

 
Texte du panneau didactique.
 
Maripol. Sélection de polaroïds, 1978-1988.
Scénographie

Émergeant dans une ville au bord de la faillite, les œuvres de Basquiat empruntent une partie de leurs supports à des objets de récupération ramassés dans la rue: elles relèvent d'une forme expressive spontanée et brute qui n’est pas étrangère à la manière dont les musiciens de la no wave, souvent autodidactes, utilisent et détournent leurs instruments. Chargée de références à l'univers urbain, traversée de séries de voyelles qui ont des allures de cri, l'œuvre de ses débuts se révèle animée par une vigueur expressionniste analogue à l'esprit post-punk cultivant la dissonance, la distorsion et le dérèglement. Ses collages pour certains transformés en cartes postales, empruntent à la culture du DIY (do it yourself) fondée sur l'appropriation, le détournement des codes et des médias ainsi que la contestation de l'autorité. En 1981, Basquiat occupe ainsi une place centrale dans l'exposition New York/New Wave, organisée au PS1 par le critique Diego Cortez comme une exploration des convergences entre no wave et arts visuels.

 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Michel Basquiat. John Lurie, 1982. Crayon gras sur papier. Collection Mugrabi.

Acteur, réalisateur, saxophoniste et compositeur John Lurie est une figure centrale de la scène downtown The Lounge Lizards, son groupe à l’instrumentation jazz dans laquelle il instille l’esprit du punk, est une formation majeure de la no wave. Amis proches, Basquiat et Lurie partageront un logement et la scène plusieurs fois avec leurs groupes respectifs. Réalisé en 1982, ce triple portrait témoigne des talents de Basquiat en la matière. Il est dédié à l’actrice Maria Duval, avec qui Lurie entretenait à l'époque une relation.
 

Lancée en décembre 1978 sur le câble, animée et produite par le journaliste Glenn O’Brien, l'émission TV Party se présente comme un talk-show décalé cultivant humour absurde, happening et dérision politique. Réalisée avec peu de moyens, elle accueille principalement des personnalités habituées du Mudd Club et inclut un orchestre maison dirigé par le violoniste et chanteur Walter Steding. De 1979 à 1982, devant ou derrière la caméra, parfois installé en régie où il utilise en direct le générateur textuel pour afficher à l'écran des aphorismes poétiques, Basquiat est un participant régulier de l'émission; il dessine plusieurs prospectus annonçant des enregistrements en public dans des boîtes de nuit et prend part à des performances ou discussions en plateau.

Jean-Michel Basquiat. Sans titre (Car Crash), 1980. Acrylique et crayon gras sur toile de jute. Collection particulière.
 
Texte du panneau didactique.
Scénographie

Né de la rencontre entre Jean-Michel Basquiat et Michael Holman à la Canal Zone Party en 1979, Gray est l'exemple le plus notable de l'inscription de Basquiat dans la scène musicale de New York downtown. Formé avec Shannon Dawson à la trompette, Holman à la batterie et Wayne Clifford au clavier, le groupe passe par plusieurs désignations, dont «Test Pattern», avant de prendre le nom de « Gray» - d'après Gray's Anatomy (1858), ouvrage médical à l'influence déterminante pour Basquiat. La formation intègre alors Nicholas Taylor à la guitare en remplacement de Dawson. Traitant leurs instruments de manière non orthodoxe et se plaçant sous l'égide de John Cage, Gray revendique une expérimentation tous azimuts. Leader officieux, Basquiat y joue de la clarinette et du synthétiseur, déclame des textes sur scène et baptise les morceaux de titres qui connaîtront des résurgences dans son œuvre plastique. Gray donne des concerts dans les principaux lieux de la scène downtown au long de l'année 1980 avant de se dissoudre ; il ne réalisera aucun album du vivant de Basquiat.

 
Texte du panneau didactique.
 
Test Pattern (aka Gray) at Hurrah, Jean-Michel Basquiat, Shannon Dawson, New York, 1980. © Courtesy of Nicholas Taylor.
Scénographie

À partir de 1980, la vague du hip-hop commence à déferler sur le Sud de Manhattan, sous l'effet de plusieurs acteurs et actrices de la scène downtown comme Edit deAk - qui présente à The Kitchen le groupe Funky Four Plus One - ou Fab 5 Freddy - qui organise avec le graffeur Futura 2000 au Mudd Club Beyond Words, l'une des premières expositions consacrées au mouvement, à laquelle Basquiat participe sous le nom de «SAMO». Le succès de Rapture de Blondie, chanson dans laquelle Debbie Harry s'essaie au rap, est une manifestation majeure de cette convergence culturelle entre les mouvements no wave et hip-hop: aux côtés de Fab 5 Freddy et de Lee Quiñones, Basquiat participe au décor du clip et y tient le rôle du DJ Grandmaster Flash, absent lors du tournage. Au cours de sa vie de noctambule, l'artiste fréquente les soirées organisées au Negril et au Roxy, pendant lesquelles officient Afrika Bambaataa et les DJ de la Zulu Nation venus du Bronx mais aussi Nicholas Taylor, son ancien partenaire de Gray converti aux platines, qu'il a lui-même baptisé du nom de «DJ High Priest».

 
Texte du panneau didactique.
 
Rammellzee, Koor, Fab Five Freddy, Jean-Michel Basquiat and Toxic at Fun Gallery, New York, 1982. © Lina Bertucci.
 
Jean-Michel Basquiat. Rammellzee, 1982. Crayon gras sur papier. Collection particulière, avec l'aimable concours de la Galerie Enrico Navarra.
 
Jean-Michel Basquiat, LA2, Kenny Scharf, Fab 5 Freddy, Maxwell, Phase 2, Revolt, Poet, 2 Bad, Peak, Beam, Real, Tec 2, Ka-zar #1 et d'autres artistes. Art Is the Word, 1981. Peinture en aérosol et crayon feutre sur aggloméré. Collection Noirmontartproduction.
Scénographie
CREW, TAGS, SAMPLING
Basquiat et la culture hip-hop

Sensible au hip-hop sur le plan visuel autant que musical, Basquiat entretient des liens avec plusieurs acteurs majeurs de cette révolution culturelle. Proche d'artistes tels que Toxic,  A-One ou ERO qui lui inspirent de spectaculaires portraits, il s'échappe en 1983 du réseau traditionnel des galeries d'art pour exposer à la Fun Gallery, espace alternatif ouvert par l'actrice Patti Astor afin de mettre en valeur cette nouvelle génération de créateurs urbains. Si elle l'amène à mêler sa couronne emblématique aux tags jusqu’à l'apposer, parfois, à même la rue l'influence du hip-hop dans l'art de Basquiat se traduit surtout pas sa manière d'envisager la photocopie - dupliquée, découpée, répétée - comme échantillonnage visuel et par un rapport de récurrence aux mots et motifs qui participe de la force compositionnelle de nombre de ses œuvres.

 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Michel Basquiat. Toxic, 1984. Fondation Louis Vuitton, Paris. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.
 
Jean-Michel Basquiat. ERO, 1984. Mugrabi Collection. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.
 
Jean-Michel Basquiat. Untitled (Left Hand Right Hand), 1984 – 1985. Collection particulière. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.
Scénographie

L'intérêt de Basquiat pour le hip-hop s'incarne notamment dans son amitié avec Rammellzee, artiste originaire de Queens reconnu pour ses talents de rappeur autant que de graffeur. En1982, Basquiat contribue à l'organisation d’une soirée au Squat Theatre mêlant graffeurs, break danseurs et DJ, destinée à promouvoir Rammellzee et sa théorie sur le lettrage des tags nommée «ikonoklast panzerism», d'inspiration afrofuturiste. Outre deux tableaux fameux portant le titre de Hollywood Africans, dans lesquels Basquiat se représente en compagnie de Rammellzee et de Toxic, cette proximité entre les artistes se traduit en 1983 par la participation de Basquiat au graphisme d'un film tiré d'une performance donnée par Toxic aux platines et Rammellzee au micro à Los Angeles, ainsi que par sa mise en exergue des talents du rappeur dans Beat Bop, l'unique disque jamais produit et réalisé par ses soins.

 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Michel Basquiat au Roxy avec Toxic et General EMC, 1983. Tirage numérique 2023. Photo Lina Bertucci. Avec le concours de Lina Bertucci Archives and Eleni Koroneou Gallery.
 
Affiche conçue par John Sex pour l'exposition « Beyond Words » au Mudd Club, organisée par Fab 5 Freddy et Futura 2000, 1981. Sérigraphie sur papier. Collection Scott, Lauren & Lily Nussbaum.
 
De haut en bas et de gauche à droite :
- Flyer conçu par Phase 2 pour «Another Def'Bet» au Negril, 1982. Photocopie sur papier. Collection Michael Holman.
- Flyer pour «hurder on Thursday» au Negril, 1982. Fac-similé. Collection particulière.
- Flyer conçu par Phase 2 pour «Sureshot Party» au Negril, 1982. Fac-similé. Avec le concours de Gallery 98.
- Flyer conçu par Phase 2 pour une soirée hip-hop au Negril, 1982. Fac-similé. Cornell University Hip Hop Collection, Division of Rare and Manuscript Collections, Cornell University Library.
- Flyer conçu par Phase 2 pour «Sureshot Body Party Nites» au Roxy, 1982. Fac-similé. Cornell University Hip Hop Collection, Division of Rare and Manuscript Collections, Cornell University Library.

En 1980, conscient du dynamisme de la scène downtown, le critique Glenn 0’Brien imagine le scénario d’un film de fiction qui serve de prétexte à immortaliser certaines des principales formations musicales du moment, en studio ou sur scène: DNA, Tuxedomoon, Kid Creole and the Coconuts, James White and the Blacks, The Plastics... Mise en images par le photographe Edo Bertoglio, l'intrigue suit les déambulations d'un peintre et musicien fauché interprété par Jean-Michel Basquiat, le temps d'une journée et d'une nuit. Tourné en décors naturels, notamment au Mud Club et dans les quartiers en ruines du Lower East Side, le film - initialement baptisé New York Beat - est victime de déboires financiers et reste inachevé jusqu'en 2000, date à laquelle O'Brien et la photographe Maripol, impliquée dans la production à l'origine, le restaurent et le diffusent sous le titre Downtown 81.

 
Texte du panneau didactique.
 
Image du film Downtown 81.


2 - SEEING SOUND
Images sonores et bruits visuels

Scénographie

Celles et ceux qui ont visité son atelier se souviennent que pour créer, Basquiat s'immergeait dans un environnement fait de musique de toute sorte, du classique au reggae, mais aussi de sons produits par la télévision ou la radio. Ses œuvres sont chargées d'éléments qui donnent à voir le bruit: onomatopées, engins qui traversent ses toiles, citations de dessins animés, représentations anatomiques qui présentent le corps et ses organes comme émetteurs de sons... Basquiat matérialise les phénomènes sonores selon un vocabulaire graphique qui emprunte parfois aux codes de la bande dessinée ou des films de série B, tout en évoquant la musique par les techniques de composition employées. Les représentations d'antennes, pylônes et autres schémas techniques témoignent également du vif intérêt de Basquiat pour les technologies de la diffusion et de l'enregistrement. Dans cette œuvre visuellement bruyante, les mots occupent aussi une place capitale: marqué par l'influence des écrivains de la Beat Generation, comme William S. Burroughs qu'il fréquente et considère comme son «auteur vivant préféré», Basquiat fait un usage abondant de l'onomatopée et intègre à ses œuvres une forme de poésie verbale qui témoigne de son intérêt pour le langage. Comme Burroughs, il parvient à réduire l'écart entre le visuel et le textuel en recourant à des logiques d'association imprédictibles, fruit d'une pensée affranchie des conventions.

 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Michel Basquiat. Sans titre (Titian), 1982. Acrylique et crayon gras sur papier. Collection particulière.
 
Jean-Michel Basquiat. Cantasso, 1982. Acrylique et collage sur toile montée sur châssis en croix. Collection particulière.
 
Jean-Michel Basquiat. Greenish Skin, 1983. Technique mixte sur papier. Collections Schorr.
Jean-Michel Basquiat. Dog Bite - Ax to Grind, 1983. Acrylique et crayon gras sur toile.
Museum Boijmans Van Beuningen, Rotterdam. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.


La prééminence des mains (la gauche «left») en particulier, qui semble sur le point de frapper les touches d’un piano) et le chien à la gueule ouverte, comme prêt à aboyer, confèrent à ce tableau une forte dimension sonore. Sur le panneau le plus à gauche, semblables à des notes sur une portée, les lettres bien que barrées laissent distinguer la mention «Hollywood Africans Part Two», qui permet d'identifier les trois croquis de visages en dessous comme ceux de Basquiat, Rammellzee et Toxic. L'expression a donné son titre à deux autres œuvres de l'artiste datant également de 1983. Toutes trois font référence à un même épisode du séjour de Basquiat à Los Angeles cette année-là: au cours d’une visite sur Hollywood Boulevard, ayant remarqué qu'aucune personnalité africaine-américaine ne figurait parmi les stars du Walk of Fame, Basquiat aurait conclu ironiquement que ses amis et lui étaient les artistes noirs les plus célèbres de l'endroit, les surnommant à cette occasion les «Hollywood Africans» (les «Africains d'Hollywood»).


3 - JAZZ
Rois, ancêtres et génie

Scénographie

De toutes les musiques auxquelles Basquiat se réfère dans sa pratique artistique, le jazz est sans conteste la plus apparente dans son œuvre. Considéré comme une contribution africaine-américaine majeure au domaine des arts, le jazz se présente à lui comme un continuum de réussite et d'excellence noires. Célébrant le génie créatif des musiciens avec l'ambition de dire une partie de leur histoire en remontant jusqu'au berceau du genre, à La Nouvelle-Orléans, Basquiat élabore des œuvres transhistoriques. Loin d’être de simples hagiographies, elles inscrivent le jazz dans une histoire diasporique plus vaste et soulignent les inégalités et le racisme subis par les musiciens inféodés aux règles de l'industrie phonographique.
Particulièrement sensible au be-bop, avant-garde du jazz qui a élargi et complexifié les principes de l'improvisation dans les années 1940, Basquiat se montre hanté par la destinée de l’un des pères fondateurs de ce courant, Charlie Parker (1920-1955), figure du double et du génie foudroyé à laquelle il dissémine des allusions biographiques dans de nombreuses œuvres. Admirateur de la capacité d'invention des musiciens, conscient des enjeux esthétiques propres au genre - notamment la sophistication de l'improvisation comme forme de composition spontanée -, Basquiat s'inspire du jazz dans l'agencement de ses œuvres. Ainsi, il en structure parfois les fonds à l'aide de photocopies, selon des séquences organisées et syncopées à la manière des «grilles» harmoniques sur lesquelles les artistes de jazz développent leurs solos.

 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Michel Basquiat. Jazz, 1986. Mugrabi Collection. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.
 
Jean-Michel Basquiat. King Zulu, 1986. MACBA, Barcelone. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.
 
Jean-Michel Basquiat. Plastic Sax, 1984. Acrylique, crayon gras et collage de photocopies sur toile. Collection agnès b. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York. Photo Marc Domage.

Dominée par la couleur bleue traditionnellement associée au blues, cette toile est inspirée de Charlie Parker, père du jazz moderne - le be-bop - avec le trompettiste Dizzy Gillespie (également représenté). Émaillée de portraits du saxophoniste d'après photographies, elle contient plusieurs allusions biographiques plus ou moins explicites. Son titre renvoie à l'instrument bon marché - un saxophone de marque Grafton dont le corps était moulé en acrylique - que le musicien a utilisé en 1983, Ambivalent, ce «saxophone en plastique» peut se lire comme une métonymie de la dépendance à l'héroïne qui amenait Parker à mettre en gage son instrument périodiquement, mais aussi comme le symbole de sa capacité à s'affranchir de la technique et à transcender le plus médiocre des instruments.
Jean-Michel Basquiat. Koko Solo, 1983. Acrylique, crayon gras et collage de photocopies sur toile.
Collection Rechulski, New York.


Bien que ce tableau ne présente en apparence aucune référence directe au jazz, son titre inscrit clairement au dos, Koko Solo, livre la clé de son interprétation musicale. Koko est en effet l’une des compositions emblématiques de Charlie Parker et des nouveaux horizons harmoniques ouverts par le be-bop aux musiciens de jazz. Établissant un système d’analogies entre les langages du be-bop et des arts visuels, organisée de haut en bas et de gauche à droite comme une partition dans laquelle chaque feuille de papier collée sur la toile tient le rôle d'une mesure, cette œuvre peut se lire comme une tentative de transposition visuelle du solo de Charlie Parker, enregistré le 26 novembre 1945 et considéré comme l'un de ses chefs-d'œuvre.
 
Jean-Michel Basquiat. Madonna, 1985. Acrylique, crayon gras et collage de photocopies sur bois. Collection particulière.

Empruntant à la tradition catholique du retable et à la représentation de la Madone Litta (v. 1490) de Léonard de Vinci, Basquiat élabore avec Madonna une composition funèbre qui rappelle le décès tragique de «Pree» Parker, la fille de Charlie Parker, disparue à l'âge de 2ans. Transformant la madone en Vierge noire, il fait figurer, à côté de taches qui évoquent des éclaboussures de peinture, de sang ou de vin, l'étiquette du disque 78 tours Afternoon of a Basic-ite de Lester Young, modèle d'après lequel Charlie Parker a élaboré son style. Par ce geste, Basquiat met en jeu les notions de filiation et de référents esthétiques, en musique comme en art.
 
Jean-Michel Basquiat. Red Joy, 1984. Acrylique, crayon gras et collage de photocopies sur toile. Avec l'aimable concours de la galerie Omer Tiroche, Londres.

Ce tableau témoigne de l'influence du jazz dans les processus créatifs de Basquiat. Syncopée par des jeux de découpage et de collage, une trame de motifs symboliques et référentiels photocopiés - parmi lesquels on retrouve Charlie Parker, Max Roach et Miles Davis, soit trois musiciens majeurs du be-bop - constitue une grille où l'artiste a déposé son «solo» sous la forme d’une variation sur un thème éternel de l'histoire de l’art: le portrait féminin. Son modèle en l'occurrence était Joy Bouldin, alias «Joystick», alors physionomiste de la boîte sélecte Congo Bill, au quatrième étage du Danceteria.


4 - DISCOGRAPHIE
Le disque comme symbole, trace et récit


Scénographie

Basquiat possédait, dit-on, plus de 3 000 disques. Par-delà l'importance accordée à la forme circulaire dans son système symbolique personnel, les disques occupent dans son œuvre une place singulière. L'une de ses pratiques scripturales les plus remarquables est en effet celle de la discographie: Basquiat liste sur toile ou sur papier les titres enregistrés par de grands musiciens de jazz comme Louis Armstrong ou Fats Waller, ou encore les données relatives à la fixation des œuvres de Charlie Parker (recopiant ces informations d'après une édition intégrale des enregistrements du saxophoniste pour la marque Savoy, qu’il possède dans sa collection). Ce procédé, par lequel il s'efforce de déjouer l'ambivalence de l'objet disque - à la fois réceptacle de l’œuvre et bien de consommation -, lui donne l’occasion de célébrer la capacité d'invention des musiciens de jazz qui, prise après prise, par leur maîtrise de l'improvisation, sont capables de décliner leurs interprétations à l'infini. Recopiant des étiquettes de 78 tours, support devenu obsolète, Basquiat souligne le caractère éphémère de la technologie et l'aliénation des musiciens aux maisons de disques, qui se sont approprié leurs œuvres de manière souvent abusive. Mentionnant titres, interprètes, numéros de matrice, références, logos et marques avec minutie, Basquiat révèle la valeur qu'il prête à ces objets: disséminés dans ses toiles sous forme de photocopies, les disques sont érigés à la fois en traces, en fétiches, en mémoire et en testament artistique.

 
Texte du panneau didactique.
 
Disques 78 tours de Lester Young (1944), Charlie Parker (1945; 1945; 1949 et 1978); Louis Armstrong and His Hot Five (1926); Louis Armstrong and His Hot Seven (1927); Louis Armstrong (1928); Fats Waller and His Rhythm (1936). Collections diverses.
Jean-Michel Basquiat. Sans titre (Estrella), 1985. Mine de plomb et crayon de couleur sur papier.
Collections Schorr.
 
Jean-Michel Basquiat. Untitled, 1988. Private Collection, Courtesy Hauser & Wirth Collection Services. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.
 
Jean-Michel Basquiat. Untitled (Dizzy), 1983. Private Collection. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York.


5 - AREA
L'art dans le tumulte des nuits new-yorkaises

Scénographie

Le 8 mai 1985, Basquiat participe, parmi une vingtaine d'artistes, à une exposition collective organisée à l'Area, boîte de nuit connue pour l'extravagance de ses soirées dont il est un habitué, à la fois comme noctambule et comme DJ occasionnel. Réalisée in situ, sa contribution prend le nom de Klaunstance, d'après une composition de Charlie Parker enregistrée en 1947. Conçue comme un ensemble, l'installation juxtapose plusieurs éléments qui seront plus tard dispersés. Au centre sont disposés vingt-sept parallélépipèdes en bois auxquels est associé un stand de cireur de chaussures sur lequel Basquiat a inscrit puis barré le mot BRAIN©. À gauche un tableau s'inspirant du principe de pentimento («repentir») met en résonance le surnom de Charlie Parker, «Bird», et celui de sa fille précocement disparue, «Pree»; à droite, un grand demi-cercle peint évoque la forme d'un disque ou d'une lune noire. Recouverts de fragments de dessins photocopiés qui empruntent à différents registres de l'univers référentiel de Basquiat, particulièrement au jazz, les «cubes» -  traditionnellement associés au jeu, à la logique et à la construction - renvoient au génie propre à la musique noire et à sa capacité à élaborer, par l'improvisation, des œuvres sans fin à partir d'un matériau musical souvent réduit. Ainsi qu'il aimait le faire lorsqu'il se mettait aux platines dans le lounge de l'Area, Basquiat convoque le souvenir de Charlie Parker trente ans après sa disparition et rappelle, au cœur des nuits new-yorkaises, l'importance de sa contribution à la culture américaine.

 
Texte du panneau didactique.
 
Basquiat devant la vitrine de Klaunstance à l'Area, 1985. Tirage numérique 2023. Photo Ben Buchanan.
 
Jean-Michel Basquiat. Sans titre, 1986. Acrylique et collage de photocopies sur boîtes en bois. Collection Annie Plumb, New York.
 
Carton d'invitation aux anniversaires jumelés de Jean-Michel Basquiat et d’Eric Goode, propriétaire de l'Area, d’après un dessin de Jean-Michel Basquiat, 1985. Lithographie offset. Collection Scott, Lauren & Lily Nussbaum.


6 - BLACK ATLANTIC
Basquiat et les musiques de l'Atlantique noir

Scénographie

Basquiat voyagea en Afrique en 1986 afin d'exposer certaines de ses œuvres et en rapporta divers tambours traditionnels qu’il conservait dans son atelier. Son œuvre témoigne de sa conscience des liens entre musiques africaines et africaines-américaines, celles-ci ont été pour lui un moyen de dialoguer avec les héritages diasporiques associés à la traite transatlantique des esclaves. Que ses toiles convoquent la figure du vacher noir accordéoniste propre au zydeco, créolisation musicale spécifique à la Louisiane, ou qu’elles relient à travers le temps les ventes aux enchères d'esclaves et le jazz, elles s'inscrivent dans une exploration des formes culturelles nées de la migration forcée des peuples africains par les Européens vers les Caraïbes et les Amériques; autrement dit, la culture de l’Atlantique noir.

Parmi les sources d'inspiration de Basquiat figure le livre Flash of the Spirit de Robert Farris Thompson (1983), qui traite entre autres de la persistance des cultures et traditions africaines aux États-Unis, ainsi que du rôle prépondérant de la musique dans la transmigration des formes culturelles. Basquiat a désigné Thompson comme son historien de l’art favori et lui a commandé un texte pour l’une de ses expositions. Thompson y décrit Basquiat comme un «extraordinaire afro-atlantiste [qui] colore l’énergie de l'art moderne (lui-même redevable à l’Afrique) de ses propres transmutations des motifs et des figurations noirs subsahariens et créoles ».

 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Michel Basquiat. Mississippi, 1982. Acrylique et crayon gras sur toile. Avec l'aimable concours de Masterworks.io.

Ce tableau montre l'importance du Mississippi dans l'imaginaire de Basquiat et la manière récurrente dont ce territoire - tant l'État du Sud que le fleuve frontière - représente pour lui une aire marquée par la créolisation, dont la musique a été l'une des manifestations les plus apparentes. Répété cinq fois tel un refrain, le nom «Mississippi» jouxte un personnage noir au bras levé et au visage hagard. Cette présence spectrale rappelle que cette terre qui a vu naître le blues a aussi été, des sévices aux lynchages, le lieu d'une violence particulièrement cruelle à l'égard des populations à l'origine de cette forme d'expression au fondement de la musique populaire du XXe siècle.
Jean-Michel Basquiat. Negro Period, 1986. Acrylique, huile, collage de photocopies et capsules collées sur panneaux de bois.
Fondation Louis Vuitton, Paris.


Réalisé l'année où Basquiat visite l'Afrique, ce triptyque inscrit l'histoire du jazz dans celles, plus larges, de la diaspora africaine et de l'art. Le titre est une possible référence ironique à la période «africaine» de Picasso - également dite période «nègre» -, durant laquelle l'artiste espagnol a puisé son inspiration dans la statuaire africaine. Truffée d’allusions à des musiciens de jazz, notamment Charlie Parker et Lester Young, cette peinture présente par sa composition une forme de musicalité: l'usage que Basquiat fait de la photocopie, de la répétition et de la fragmentation de ses propres dessins n’est pas sans rappeler les logiques du riff dans le jazz ou du sampling dans le hip-hop. La figure isolée sur le panneau de droite et la récurrence des visages noirs symbolisent la contribution des Noirs à l'histoire de l’art et aux réalisations humaines représentées dans les dessins, mais suggèrent aussi la marginalisation et l’aliénation des individus d’origine africaine dans ces récits.
Jean-Michel Basquiat. Slave Auction, 1982. Acrylique, crayon gras et collage de papier sur toile.
Centre Pompidou, musée national d'Art moderne / Centre de création industrielle, Paris, don de la Société des amis du musée national d'Art moderne (1993).

Slave Auction s'attache à illustrer un épisode douloureux de l’histoire de la diaspora africaine: la vente à l’encan des Noirs déportés à leur arrivée aux Amériques. Dans un grand geste expressif et grimaçant, n’hésitant pas à convoquer les clichés de la caricature raciste, Basquiat subvertit la tradition picturale de la marine - qui a magnifié pendant plusieurs siècles la puissance conquérante de l'Occident - en évoquant la violence du Passage du Milieu. Par une analogie féroce, l'œuvre rappelle qu'au XXe siècle, le corps noir est toujours mis au labeur pour la satisfaction de la majorité blanche, par exemple dans le sport - le marchand aux esclaves étant vêtu de la tenue rayée des arbitres de football américain - ou dans la musique, comme en témoignent les consonnes partiellement occultées «PRKR», allusion voilée à Charlie Parker.


7 - HEROICA
Héroïsme, musique et mémoire

Jean-Michel Basquiat. Eroica I & Eroica II, 1988.
Collection of Nicola Erni. © Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York. Photo Reto Pedrini.

Réalisés et exposés à New York en 1988, l’année de sa disparition, Eroica l et Eroica II offrent une sorte de coda à la musicalité de l’art de Basquiat et, à certains égards, à sa vie. Peint à l’origine sur une seule et même large feuille de papier, ce diptyque doit son titre à la symphonie n°3 de Beethoven, dite Eroica («héroïque» en italien), que son auteur avait dédiée à Napoléon Bonaparte, porteur des idéaux de la Révolution française, avant de se raviser lorsque celui-ci se proclama empereur. Parallèlement à cette allusion au tyran - qui contra la révolution anticoloniale en Haïti et rétablit l'esclavage - et à la tradition musicale savante occidentale, Basquiat utilise le rythme, l’allitération et le langage pour, à partir d’une liste de mots en «B» tirée d’un dictionnaire d’argot africain-américain, faire résonner différentes thématiques: l'identité noire et la diaspora mais aussi la musique, la drogue et le désir, ouvrant une multitude de champs de signification par l'association et l'interprétation. Les aplats tourmentés de peinture bleu-gris rattachent les deux panneaux à la mélancolie du blues, renforcée par la mention des titres F.D.R. Blues et Fixin’ to Die Blues. La répétition du symbole et des mots «Man Dies» («l’homme meurt ») qui se superposent en transparence, sur le panneau de droite, au signe du dollar convoque le spectre de la mort et de la marchandisation. Cette œuvre tourmentée invite à réfléchir au prix de la célébrité payé par Basquiat et à mesurer l’héroïsme de sa célébration du génie artistique noir - et en particulier de la place occupée en son sein par la musique.

 
Texte du panneau didactique.
 
- Luth Banza en provenance d'Haïti. Vers 1840. Collection du Musée de la musique, Paris. Ancienne collection Victor Schœlcher.

- Ludwig van Beethoven (1770-1827). Facsimilé de la Symphonie N°3 en mi bémol majeur, dite «Héroïque», opus 55. Copie anonyme de la partition établie en août 1804 pour la gravure de la partition, feuille de titre.
Collection particulière.


Chronologie

Chronologie 1960-1982
Chronologie 1983-1988