JANIS ET JOHN

Article publié dans la Lettre n° 219


JANIS ET JOHN. Film français de Samuel Benchetrit avec Marie Trintignant, Sergi Lopez, François Cluzet, Christophe Lambert, Jean-Louis Trintignant (2003-couleurs-1h40).
La vie de Pablo, 42 ans, ressemble par sa banalité à celle de beaucoup de couples mariés depuis des années et qui n’ont plus grand chose à se dire ni à partager. Sa femme Brigitte déprime un peu plus chaque jour. Quant à lui, son métier d’assureur pour une compagnie suisse lui pèse de plus en plus. Dans son esprit, le seul remède à cette existence médiocre est d’arrondir ses fins de mois. La tentation d’établir un faux contrat et d’encaisser les primes devient une évidence et monsieur Cannon, amoureux d’une voiture ancienne qu’il laisse dans son garage de peur de l’abîmer, la victime idéale. Aussitôt pensé aussitôt fait. Le client est heureux d’être assuré tous risques et Pablo plutôt content de placer sur un compte les primes encaissées. Mais l’inévitable survient: un beau matin, monsieur Cannon vient déclarer le vol puis l’accident de sa chère voiture. Comment rembourser la prime? Pablo est anéanti. L’héritage providentiel d’un cousin, en partie détruit par la drogue et qui ne vit dans son magasin de disques que dans le souvenir de Janis Joplin et John Lenon, les deux stars de sa jeunesse, donne à notre escroc une idée qu’il croit géniale: faire passer sa femme pour Janis et un acteur pour John, aux yeux emmerveillés du cousin, charge à eux de lui soutirer la somme nécessaire au remboursement de la prime. Mais l'imprévu arrive: nos deux acteurs se prennent au jeu.
On ne s’attarde guère à l’intrigue complètement loufoque de ce film (c’est normal, Gabor Rassov y a mis son grain de sel), parce que son intérêt repose essentiellement sur le jeu des comédiens. Si Sergi Lopez, Pablo diabolique, Christophe Lambert, disquaire déjanté et François Cluzet, John Lenon époustouflant, tirent avec un réel talent, leur épingle du jeu, Il est bien difficile de rester objectif quand on a connu et aimé Jean-Louis et Marie Trintignant. L’esprit du film leur ressemble. C’est l’émotion qui prime à la vue du regard de Jean-Louis dont le personnage est, dit-il en substance, comme quelqu’un qui vient de perdre un être cher et qui n’a pas encore l’habitude. C’est une grande peine qui pointe à chaque apparition de Marie. Très investie dans ce rôle original, elle tire un formidable parti des personnalités multiples qui la rendaient tellement insaisissable: la Marie sage et effacée dans le rôle de Brigitte la dépressive, la Marie qui renaît au bonheur lorsqu’elle découvre tout à coup qu’elle est utile et qu’elle peut réaliser quelque chose dont elle ne se croyait pas capable. C’est dans cette transformation qu’elle est merveilleuse, se débarrassant peu à peu de son enveloppe de femme au foyer éteinte pour se glisser peu à peu dans la peau d’une star dont elle ignorait tout mais dont elle endosse sereinement le parcours.
Avec la disparition de Marie, ce film prend alors une toute autre dimension car le message d’amour qu’il délivre semble tout à coup être celui laissé en testament par une jeune femme indépendante et passionnée, éprise de liberté, aimante et aimée, perdue pour toujours. Lien: www.marsdistribution.com/site/janisetjohn/


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