HERITAGE FIGHT
Duel en terre aborigène

Article publié exclusivement sur le site Internet, après la Lettre n° 372
du 6 octobre 2014


HERITAGE FIGHT. Duel en terre aborigène. Film documentaire d'Eugénie Dumont (France - couleurs - 2014 - 1h30).
Partie pour l'Australie à la rencontre des populations aborigènes afin de comprendre leur culture vieille de 40.000 ans, cette jeune réalisatrice de 23 ans arrive dans la péninsule de Broome, au nord-ouest du pays, alors qu'un combat est engagé entre les habitants et la compagnie Woodside. Celle-ci a décidé de construire dans cette zone, l'une des moins peuplée d'Australie, très touristique et encore préservée, le plus grand complexe gazier du monde. Eugénie Dumont modifie son projet et au lieu de ne faire un film que sur la culture aborigène, elle montre avant tout le conflit qui oppose les Aborigènes et des habitants blancs de la région d'une part, et la puissante société pétrolière d'autre part.
Le rapport de forces est disproportionné. D'un côté des individus qui luttent avec leur seul bon droit, le sacrifice de leur temps et leur courage ; de l'autre la plus grande compagnie pétrolière du pays, soutenue par le gouverneur de la région de Kimberley, dont l'étendue est presqu'aussi grande que celle de la France, et la police. Les tribunaux condamnent le projet, fait sans aucune concertation ni étude d'impact. Peu importe, le gouvernement local change alors la loi !
Le film nous présente quelques-uns des principaux protagonistes. Il y a tout d'abord Teresa Roe, que tout le monde appelle Granny (mamie), fille de Paddy Roe, un héros national qui a su créer un lien d'amitié entre les blancs et les Aborigènes. Puis deux de ses fils, Joseph Joe qui dirige les opérations en prêchant la non-violence, et Richard Hunter, gardien du territoire, vivant totalement en dehors du système occidental. Il y a aussi deux blancs installés dans cette région, Louise Middleton, qui a ouvert un blog devenu un manuel de résistance et qui a payé des recherches scientifiques pour montrer que cette société allait détruire, entre autres, l'un des plus vastes champs de fossiles de dinosaures du monde, et Shane Hugues qui a été le premier a établir un barrage sur la route pour empêcher les bulldozers de passer.
Ces interviews nous permettent de comprendre ce que leur territoire représente pour les Aborigènes. C'est leur patrimoine (heritage). C'est là que sont enterrés leurs morts. Vendre son terrain à Woodside, comme le font certains, c'est vendre ses ancêtres et tout ce qu'ils ont légué. Louise l'explique très bien, peut-être mieux que Joe ou Teresa. Nous avons aussi un aperçu de la religion et des croyances de ces habitants et comprenons mieux leurs motivations profondes, indépendamment des problèmes écologiques tels que la surpopulation découlant d'un tel projet et l'impact sur les baleines à bosses qui viennent se reproduire dans les eaux qui bordent la péninsule de Broome.
Nous aurions voulu mieux connaître ces Goolarabooloo, savoir comment ils procédaient pour «rêver tous ensemble» afin de rendre le rêve possible, mais nous comprenons qu'Eugénie Dumont ne pouvait pas les voir se faire dépouiller par une société sans scrupule, sans en être le témoin. Son film est d'ailleurs le seul qui montre la violence de la police envers les habitants une fois partis les médias venus couvrir les évènements. Un film passionnant décrivant l'Australie et les monstruosités commises par les colonisateurs, d'une manière moins conventionnelle que les brochures touristiques. En salles à partir du 8 octobre 2014. Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici


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